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Madagascar

Mesurer les impacts des projets d’électrification décentralisée (4/4). Caractérisation des impacts sur l’accès à l’électricité à partir des données de ménages

Pour Entreprenante Afrique nous présentons en quatre articles le projet Café Lumière à Madagascar et comparons les résultats de différentes méthodes d’évaluation alternatives réalisées à des coûts abordables pour évaluer…

Pour Entreprenante Afrique nous présentons en quatre articles le projet Café Lumière à Madagascar et comparons les résultats de différentes méthodes d’évaluation alternatives réalisées à des coûts abordables pour évaluer l’existence d’impacts positifs du projet sur les objectifs de développement. Dans ce quatrième et dernier article, nous explorons comme pour la partie « localités » de notre enquête, les impacts sur les ménages par comparaison des évolutions des variables d’intérêt dans les localités traitées et non traitées. Grâce au nombre de ménages qui ont été enquêtés dans chaque localité [1], nous pouvons évaluer la significativité statistique de nos conclusions, c’est-à-dire évaluer le risque que nos conclusions d’existence d’un impact soient erronées. Les variables d’intérêt étudiées sont celles que l’on peut considérer logiquement comme des résultats d’impacts potentiels du projet sur les ménages.

 

Accès à l’électricité

Sur l’échantillon de ménages enquêtés, 18% ont adopté une connexion au mini-réseau dans les localités équipées d’un Café Lumière. Les autres formes d’accès à l’électricité sont pour l’essentiel des panneaux solaires individuels fixes ou mobiles. Le taux d’accès à l’électricité, défini comme comprenant toutes les sources d’électricité possibles, est relativement similaire entre les deux groupes de localités en 2023 avec 46% des ménages ayant accès dans les localités avec Café lumière contre 43% dans les localités sans.

Il convient toutefois de noter que le taux d’accès à l’électricité était initialement plus élevé dans les localités qui ont par la suite été équipées de Café Lumière (37% contre 27%) et cette différence est significative. Il n’y a donc pas d’amélioration significative de l’accès à l’électricité d’un point de vue quantitatif, mais il y a un remplacement de panneaux solaires individuels par des connexions au mini-réseau. Cette seconde source est considérée comme qualitativement supérieure. Si l’on prend comme référence le cadre multi-niveaux (Multi Level Framework ou MTF) défini par la Banque mondiale, le premier type d’accès est considéré de niveau 1 contre un niveau 2 pour le branchement au mini-réseau. Ceci provient principalement de deux différences entre les deux types d’accès : puissance disponible plus élevée et intermittence plus faible. Ce constat est corroboré par des données sur l’utilisation d’appareils électriques.

 

Utilisation de matériels électriques

Afin d’analyser l’utilisation d’appareils électriques, nous calculons un indice qui est la somme d’appareils électriques utilisés par un ménage. Les appareils pris en compte sont les suivants : cuisinière, réfrigérateur, ventilateur, radio, télévision, magnétoscope, lecteur dvd, ordinateur, tablette, téléphone fixe, téléphone mobile. Ainsi un ménage propriétaire d’un ventilateur et d’une radio aurait alors un score de 2, et un ménage disposant de tous les biens mentionnés aurait un score de 11.

Nous constatons lors de la deuxième vague d’enquêtes que les ménages vivant dans les localités avec Café Lumière utilisent plus d’appareils électriques que ceux vivant dans les localités sans Café Lumière. Les ménages vivant dans les localités avec Café Lumière ont en moyenne 1,7 appareils électriques contre seulement 1,5 dans les autres localités. Bien que cette différence puisse paraître faible, elle est statistiquement significative au seuil de 1%.

L’utilisation de plus d’appareils électriques dans les localités traitées est clairement due à l’amélioration de la qualité de l’accès à l’électricité pour les 18% de ménages disposant désormais d’une connexion au mini-réseau.

Pour corroborer cette conclusion, nous construisons un deuxième indice d’usage d’appareils électriques, ne prenant en compte que les appareils nécessitant une puissance relativement importante pour fonctionner, généralement indisponible quand l’accès à l’électricité est au niveau 1 du MTF. Cet indice est composé des appareils suivants : cuisinière, réfrigérateur, ventilateur, télévision, magnétoscope, lecteur dvd et ordinateur.

Sur ce nouvel indice nous trouvons un impact positif très significatif des Cafés Lumière. En effet, les ménages n’utilisent en moyenne que 0.20 appareils électriques de puissance importante  en 2023 dans les localités sans Café Lumière, là où ils en utilisent 0.37 dans les localités avec Café Lumière (ce chiffre monte même jusqu’à  1.20 pour les ménages utilisant le mini-réseau alors qu’il n’y avait pas de différence significative en 2017/2018).

 

Richesse des ménages

Afin d’évaluer un éventuel impact des Cafés Lumière sur le niveau de richesse des ménages nous construisons une série d’indices synthétiques basés sur des variables reflétant les possessions matérielles des ménages. Il convient de préciser que cet indice représente donc un stock d’actifs, et non pas un flux tel que le revenu mensuel ou annuel du ménage. Nous procédons par une Analyse des Correspondances Multiples (ACM), qui est une méthode d’analyse des données permettant de synthétiser l’information de multiples variables qualitatives selon quelques axes complémentaires. L’axe contenant le plus d’informations est généralement considéré comme représentatif de la richesse des ménages. Les possessions des ménages utilisées pour calculer cet indice de richesse synthétique prennent en compte des éléments liés à la qualité du logement comme pouvant être mesuré par les matériaux utilisés pour le sol, les murs ou le toit, le nombre de pièces et d’étages, etc.,  mais aussi des équipements électriques (cf. liste ci-dessus) et l’ensemble des biens possédés par le ménage tels qu’un vélo, un cyclomoteur, une voiture, une montre, etc. Chaque ménage dispose alors d’un score représentant son niveau de richesse. Cet indice a une moyenne de 0, et va d’un minimum de -2.17 pour le ménage le plus pauvre à un maximum de 5.22 pour le ménage le plus riche.

Lorsque nous analysons la différence des scores en 2023 entre les localités équipées de Café Lumière et les localités non-équipées, nous constatons que l’indice de richesse moyen des ménages vivant dans une localité avec Café Lumière est plus élevé, et cela de manière quasiment significative. Comme illustré dans la figure 1, la moyenne de l’indice de richesse pour les localités avec Café Lumière est de 0.19 contre seulement 0.03 pour les localités n’ayant pas reçu de Café Lumière. L’absence d’écart en 2017/2018 renforce la robustesse de cette conclusion. À noter que lorsque nous calculons l’indice de richesse sans prendre en compte la possession d’appareils électriques, ce que nous pourrions appeler « indice de richesse non énergétique », nous ne trouvons aucun impact des Cafés Lumière. Ceci nous amène à conclure que si les Cafés Lumière ont eu un impact positif sur l’accès à l’électricité et sur son usage par les ménages, cette amélioration de leurs conditions de vie matérielles ne s’est, à ce stade, pas diffusée plus largement.

 

Données socio-économiques

Au-delà des objectifs d’amélioration globale de la situation énergétique et économique dans les localités traitées, le projet Café Lumière a pour principal objectif de contribuer à des progrès socio-économiques. En ce qui concerne la pauvreté économique, nous constatons une petite amélioration de la distribution de l’indice de richesse au bénéfice des 20% les plus pauvres mais celle-ci n’est pas imputable directement à l’introduction du Café Lumière.

Si nous regardons du côté de l’accès à la santé et à l’éducation qui sont les domaines les plus étudiés dans des travaux d’évaluations similaires, nous constatons quelques preuves d’impact dans le premier domaine mais pas dans le second. Ceci est cohérent avec le volet “localités” de notre enquête, qui a montré de nombreuses connexions de centre de santé aux mini-réseaux mais proportionnellement de moins d’établissements scolaires.

Enfin nous avons étudié les effets du projet sur l’incertitude associée aux vols de bétail, de récoltes ou d’autres biens que subissent les ménages dans les régions rurales à Madagascar. Il est souvent avancé que l’introduction de l’éclairage public la nuit peut contribuer à améliorer cette situation, mais ceci n’est pas clairement prouvé à ce stade.

Concernant les questions de santé, si nous comparons les déclarations de symptômes, tels que des problèmes de voies respiratoires (toux/rhume, etc.), de diarrhées, fièvres, maux de têtes et des problèmes aux yeux ou des brûlures, nous constatons qu’il n’y a pas de différence significative entre les deux groupes de localités en 2023. Cependant il est intéressant de noter que lors de la première vague d’enquête, c’est-à-dire avant l’installation des Cafés Lumière, les symptômes étaient bien plus importants dans les localités qui ont reçu des Cafés Lumière et ceux-ci ont connu une baisse importante de la prévalence de symptômes entre les deux vagues, qui pourrait être interprétée comme une conséquence du projet Café Lumière.

Zoom sur les accouchements : nous constatons que les accouchements ayant lieu dans un environnement éclairé grâce à l’électricité est devenue quasi systématique dans les localités disposant d’un Café Lumière. En effet, pour les femmes vivant dans une localité avec Café Lumière, 78% d’entre elles accouchent dans des installations bénéficiant de l’éclairage électrique contre seulement 40% dans les autres localités. Cette différence de moyenne est statistiquement très significative.

Conclusions

Cette quatrième et dernière étape de notre série d’articles sur l’évaluation à date des impacts du projet Café Lumière à Madagascar a permis d’étudier les bénéfices retirés par la population des localités concernées en termes d’accès à l’électricité, et de niveau de vie ainsi que de ses impacts sur le développement socio-économique.

Avant  la mise en œuvre du projet, les localités étudiées n’étaient pas caractérisées par une pauvreté énergétique absolue qui peut être définie par l’absence d’accès à toute source d’électricité. En moyenne en 2017-2018 un tiers des ménages avaient déjà accès à l’électricité via des panneaux solaires autonomes. L’impact énergétique le plus visible du projet sur les ménages est que 18% des ménages dans les localités équipées bénéficient désormais d’une connexion au mini-réseau. Pour ces ménages, cet impact énergétique est important, car il se traduit par l’utilisation d’appareils électriques plus nombreux et de plus forte puissance. Dans notre précédent article de ce blog nous avions d’ailleurs montré qu’une partie des ménages abonnés utilisaient leur abonnement à la fois pour leurs propres besoins en tant que consommateurs mais aussi pour des activités génératrices de revenus.

Nous avons constaté que dans les localités équipées, l’indice de richesse des ménages a augmenté mais seulement si l’on tient compte de la possession d’appareils électriques. L’enrichissement des ménages par l’arrivée du mini-réseau ne semble donc pas pour l’instant avoir créé de transformation économique au-delà de l’acquisition par les ménages connectés de quelques appareils électriques requérant le passage à une puissance plus forte et une intermittence plus faible apportée par le mini-réseau. Des efforts restent à fournir pour les ménages les plus pauvres car même s’ils bénéficient de l’amélioration des services publics et des services de la boutique ne peuvent à date pas enclencher un véritable développement économique. Ce constat fait échos au fait que nous avions montré dans notre précédent article que pour l’instant  l’impact sur les activités génératrices de revenu s’était limité au passage à l’alimentation électrique de leurs outils de production par le mini-réseau.

Dans les domaines sociaux, l’arrivée des mini-réseaux a eu des impacts positifs sur la santé. La situation s’est particulièrement améliorée du fait de la connexion des centres de santé primaire (csb2) aux mini-réseaux. L’amélioration de la santé publique a aussi bénéficié d’une synergie avec d’autres programmes nationaux et internationaux en collaboration avec la Banque Mondiale et UNICEF notamment pour les campagnes de vaccination.

Les impacts observés à ce jour paraissent limités mais il faut relativiser ce constat par le fait que l’on ne voit pour l’instant que des impacts à court terme. Ainsi, si toutes les localités équipées atteignaient les mêmes résultats que la localité la plus performante en termes de connexions de ménages, Talata Dondona (36%), on atteindrait le double de connexions des ménages. Par ailleurs, les transformations économiques pouvant être stimulées par les impacts purement énergétiques sont nécessairement longues à obtenir. Il en va de même des progrès socio-économiques pouvant requérir, comme dans le cas de la santé, des politiques publiques complémentaires.

[1]  599 ménages ont été interrogés lors de la première vague (2017/2018) et 595 lors de la deuxième vague (2023). 133 ménages de la première vague n’ont pas été retrouvés lors de la seconde. Ils ont été remplacés par 129 nouveaux ménages. Au total, 466 ménages ont été enquêtés au cours des deux vagues.

 

Dans la même série “Mesurer l’impact des projets d’électrification décentralisée”, découvrez les articles suivants : Les Cafés Lumière de Madagascar (1/4), Utilisation de la télédétection: premiers résultats sur l’impact des Cafés Lumière (2/4), Caractérisation des impacts sur l’accès à l’électricité à partir des données de localité (3/4).

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Mesurer les impacts des projets d’électrification décentralisée (3/4). Caractérisation des impacts sur l’accès à l’électricité à partir des données de localité

Pour Entreprenante Afrique nous présentons en quatre articles le projet Cafés Lumière à Madagascar et comparons les résultats de différentes méthodes d’évaluation alternatives réalisée à des coûts abordables pour évaluer…

Pour Entreprenante Afrique nous présentons en quatre articles le projet Cafés Lumière à Madagascar et comparons les résultats de différentes méthodes d’évaluation alternatives réalisée à des coûts abordables pour évaluer l’existence d’impacts positifs du projet sur les objectifs de développement. Dans ce  troisième volet, nous mobilisons les rapports d’activité de l’opérateur Anka qui fournissent, pour chaque localité équipée, des séries mensuelles de consommation d’électricité par grands types d’usage et les données associées sur le nombre de clients, que nous complétons avec les premiers résultats de l’enquête socioéconomique menée en 2017/18 et 2023,  dans son volet enquête de localité.  Ces données, permettant en partie des comparaisons avec les localités témoins (non équipées) permettent aussi d’identifier les principaux canaux de transmission de l’accès à l’électricité  sur les objectifs de développement durable . Cette analyse sera complétée dans la quatrième livraison de ce blog par le traitement du volet ménages de l’enquête, dans lequel les réponses de 50 ménages par localité permettront d’affiner le diagnostic en considérant les effets aval de l’électrification sur le bien-être des ménages.

 

Performances d’ensemble de la production d’électricité

Nous avons montré précédemment que le projet Cafés Lumière a eu un impact positif sur l’accès à l’électricité dans les localités concernées. Cet impact peut être variable d’une localité à l’autre. Une illustration de l’impact des Cafés Lumière sur la mise à disposition d’électricité par le mini-réseau est fournie par la Figure 2, qui compare la consommation électrique totale annuelle en 2022 au potentiel de production des panneaux solaires (convertie en MWh annuels).

Figure 1 : production potentielle d’électricité et consommation totale d’électricité par localité en 2022

Figure 1 : production potentielle d’électricité et Consommation totale d’électricité par localité en 2022

La Figure 1 montre que plus l’installation dispose d’une puissance élevée et plus la quantité d’électricité consommée hors éclairage public est élevée. Cette relation n’indique cependant pas nécessairement une relation causale car la puissance des installations a été établie en fonction de la population à électrifier.  La relative faiblesse des ratios entre consommation journalière et production potentielle  correspond au fait que la courbe de charge journalière est très loin d’être plate. De fait, dans l’enquête localité de 2023 il est souvent rapporté que le mini-réseau sature déjà sa capacité en période de pointe ce qui constitue une contrainte forte pour les quelques abonnés en triphasé.

Les installations à Ambatonikolahy et Amparaky semblent produire en dessous de leur potentiel, ce qui peut être dû à un faible nombre d’abonnés ménages, les plus gros consommateurs étant, comme ailleurs, contraints par la capacité. À Ambohimalaza, la production photovoltaïque insuffisante  en période de pointe (utilisation de la décortiqueuse) est  compensée par la mobilisation du générateur diesel de secours. Un examen plus approfondi des rapports d’activité d’Anka va nous permettre de préciser ces commentaires, tout comme il sera l’occasion de comparer les progrès obtenus dans les principales catégories de consommation.

 

Consommation des ménages

Les ménages ont initialement bénéficié de l’activité des Cafés Lumière par la création des boutiques. Ces boutiques, fonctionnant sur le mode d’un kiosque énergétique ont le mérite de s’adresser aux personnes qui n’ont pas les moyens de payer un abonnement au mini-réseau. Les recettes des boutiques semblent indiquer que de nombreux ménages ont été au départ clients de la boutique, puis se sont abonnés au mini-réseau.  Même si le rôle des boutiques a été essentiel au début, l’effet quantitatif  principal du projet passe maintenant par ce dernier canal.

Figure 2 : Évolution du nombre de ménages abonnés

La Figure 2 présente l’évolution du nombre de ménages abonnés. Celle-ci est dynamique, mais avec une grande diversité de situations. En dehors des Cafés Lumière de Ambatonikolahy, Ambohimalaza et Amparaky, on constate une croissance de l’usage d’électricité par les ménages assez forte, mais cette croissance est extensive plutôt qu’intensive (pas de dynamique notable de la consommation par abonné, de l’ordre de 5kWh par mois). Pour atteindre de véritables effets économiques, il faut parvenir à une intensification des usages électriques par les ménages qui ajouteraient à l’éclairage domestique des consommations pouvant créer des revenus. Des informations complémentaires fournies par Anka sur la structure de la consommation d’électricité en 2023 vont nous permettre d’observer dans la section suivante le démarrage de cette dynamique.

 

Consommation des activités génératrices de revenus

L’autre source principale d’impacts économiques est bien sûr le développement des activités génératrices de revenus (AGRs) dont la création ou la modernisation dépend de l’usage de l’électricité. De ce point de vue, les résultats semblent mitigés. A ce jour, il n’y a que très peu d’AGRs mentionnés dans les rapports d’activité d’Anka : au maximum 4 à Antanamalaza. Par ailleurs, la plupart de ces activités ont des consommations d’électricité modestes, les seules exceptions étant les décortiqueuses et broyeurs, liés à l’activité agricole à Ambatonikolahy, Ambohimalaza, Antsampandrano et Amparaky. Les autres activités sont diversifiées, elles concernent des activités de bar, menuiserie, coiffure, pâtisserie, peinture automobile, poissonnerie, jeux vidéo.

Sauf exceptions, le développement des AGRs est nécessairement lent à se produire, et  des données complémentaires fournies par Anka sur la situation actuelle début 2023 indiquent un réel potentiel d’évolution. En effet Anka a constaté qu’un certain nombre de ménages utilisent déjà leur abonnement pour faire fonctionner des appareils électriques permettant  des activités productives sans avoir d’abonnement en tant qu’entrepreneurs.  Il y aurait ainsi à mi-2023, 32 utilisateurs d’électricité produite par le mini-réseau à des fins de production de services, dont seulement 12 AGRs déclarées en tant que telles. Les 20 producteurs comptés dans les ménages (représentant 5% du total des ménages abonnés) ont des activités variées, telles que bars, épiceries-bars, gargotes, vente de jus de fruit, recharges de téléphones, multiservices, soudure. Ces activités se retrouvent dans toutes les localités et leur diversité atteste d’un certain dynamisme. Il faut noter de plus que les gargotes et boutiques, identifiées dans le volet localité de notre enquête socio-économique, en moyenne au nombre de 5 par localité,  ne sont que partiellement mentionnées comme producteurs de services  par Anka.

On ne peut pas séparer la consommation des ménages producteurs de services de la consommation totale des ménages mais on peut en avoir une approximation en utilisant les données sur les consommations des AGRs déclarées comme telles. Cette consommation estimée est sensiblement supérieure, de l’ordre de 40%, à celle des autres ménages abonnés. Le développement de ces activités pourrait par la suite accroitre la demande d’électricité  destinée à des usages productifs et donc les impacts économiques des Cafés Lumière.

Les données du volet localité de l’enquête socio-économique permettent une interprétation plus précise de ces données de consommation.  Il n’y a pas de forte augmentation du nombre des activités de production de services, et pas plus dans les localités électrifiées par le mini-réseau que dans les localités témoins. En revanche, alors que ces activités fonctionnaient auparavant, et fonctionnent toujours dans les localités témoins, avec des générateurs diesels et des panneaux solaires individuels, elles se sont quasiment toutes converties à l’électricité apportée par le mini-réseau dans les localités équipées. Cela constitue une source de progrès pour ces dernières, de même que, pour toutes les activités converties du diesel au mini-réseau solaire (en moyenne plus de 6 par localité), une source de contribution à la préservation de l’environnement.

 

Services collectifs

La dernière catégorie de consommation d’électricité recensée par Anka est celle des services collectifs. Elle représente une part minoritaire de l’électricité consommée sur le mini-réseau en 2022. Elle peut néanmoins engendrer des impacts non-négligeables sur la réalisation des objectifs du développement durable : santé (ODD3), éducation (ODD4), Paix, justice et institutions efficaces (ODD16).

L’objectif santé fait l’objet d’une assez grande attention, avec tous les centres de santé de base (csb2) des localités électrifiées  (5 csb2 dans 6 localités alimentés par le mini-réseau, et une consommation moyenne mensuelle de 23 kWh par csb2. Par comparaison, la moitié était électrifiée (par des panneaux solaires) en 2017. Tous ces centres de santé bénéficient maintenant de l’éclairage et de réfrigération, mais l’utilisation de l’électricité pour faire fonctionner des appareils médicaux est  encore rare. La situation est très différente dans les localités témoins où seulement la moitié des centres de santé ont accès à de l’électricité en 2023, produite par des panneaux solaires.

L’éducation est également concernée, mais avec des ambitions plus réduites. A partir d’une situation où aucune école n’était électrifiée en 2017, la moitié des écoles dans les localités équipées sont électrifiées mais avec une consommation faible (1,8 kWh par mois par école électrifiée). Par comparaison aucune école ne dispose d’électricité dans les autres localités.

Les activités collectives associées à l’ODD16, 8 structures administratives et 10 églises, consomment en moyenne en 2022 8 kWh par mois et par structure dans les localités électrifiées.  Dans ces localités, environ la moitié des mairies et des gendarmeries est électrifiée dans les localités  équipées d’un mini-réseau. Les églises y sont, quant à elles toutes électrifiées.

Par ailleurs l’éclairage public peut aussi avoir des impacts sur l’ODD16, en rapport avec la sécurité. Toutes les localités électrifiées par les Cafés lumière ont investi dans l’éclairage public, mais pas de manière prioritaire, son branchement sur le mini-réseau ayant été parfois retardé. Son amplitude nocturne est réduite en dehors d’Ambatonikolahy et de Talata Dondona. Par ailleurs la mairie d’Amparaky y a renoncé en 2022 en raison de coûts jugés trop élevés (cette situation étant évolutive en 2023).  Au total, en 2022, les localités électrifiées n’ont consommé que 12 kWh par mois pour l’éclairage public, soit moins que pour les  structures administratives ou les églises.

L’éclairage public disponible n’est pas significativement différent dans les localités avec mini-réseau que dans les localités témoins, avec en moyenne de l’ordre de 5 lampadaires par localité. Le mini-réseau alimente 2/3 des lampadaires dans les localités concernées. Cela ne semble pas améliorer la situation sécuritaire. Les deux localités avec mini-réseau assurant un éclairage nocturne prolongé ne font pas état de moins de problèmes de sécurité. Les principaux problèmes sont associés au vol de récoltes et il semble que le principal facteur d’amélioration de la sécurité soit l’activité de la gendarmerie.

 

Dans la même série “Mesurer l’impact des projets d’électrification décentralisée”, découvrez aussi les articles suivants : Les Cafés Lumière de Madagascar (1/4), Utilisation de la télédétection: premiers résultats sur l’impact des Cafés Lumière (2/4), Caractérisation des impacts sur l’accès à l’électricité à partir des données de ménages (4/4).

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Mesurer l’impact des projets d’électrification décentralisée (2/4). Utilisation de la télédétection : premiers résultats sur l’impact des Cafés Lumière

Les évaluations courantes des projets d’électrification décentralisée ne permettent en général pas de prouver leurs impacts, et pour ce faire il faudrait mener des travaux couteux et longs à réaliser…

Les évaluations courantes des projets d’électrification décentralisée ne permettent en général pas de prouver leurs impacts, et pour ce faire il faudrait mener des travaux couteux et longs à réaliser car nécessitant des informations nombreuses et détaillées non seulement dans les localités équipées mais aussi dans des localités témoins. Pourtant des preuves d’impacts sont essentielles pour aider à la prise de décision des décideurs publics, nationaux mais aussi parfois internationaux, pour un passage à l’échelle de ces solutions.

Pour Entreprenante Afrique nous présentons en quatre articles les Cafés Lumière à Madagascar d’Electriciens sans frontières et comparons les résultats de différentes méthodes d’évaluation alternatives réalisées à des coûts abordables pour tester et évaluer l’existence d’impacts positifs du projet sur les objectifs de développement durable.  Dans ce deuxième volet, nous explorons la possibilité de tester la présence d’impacts à partir de données de télédétection, en général peu couteuses à mobiliser.

 

Contribution de la télédétection aux analyses d’impact

La télédétection repose sur l’imagerie satellitaire disponible à des degrés de granularité très fins sur la quasi-totalité du globe et accessible presque en temps réel et à faible coût pour un certain nombre de phénomènes terrestres mesurables et signifiants pour étudier les activités humaines. En ce qui concerne l’impact des projets d’électrification, la mesure par imagerie satellitaire de la luminosité nocturne peut être utilisée pour des études d’impact, dès lors que l’on a acquis une bonne expérience de l’interprétation de ces données. Il a été montré de manière répétée que l’augmentation de la luminosité nocturne est un bon corrélat des progrès de l’électrification au cours du temps, y compris à des niveaux fins de granularité (voir Berthélemy, 2022, dans The Conversation). Il est même considéré que l’augmentation de la luminosité nocturne est un reflet de la croissance de l’activité économique (Hu and Yao (2022).

Toutefois, les détracteurs de cette nouvelle approche utilisant l’observation de phénomènes naturels corrélés partiellement aux conséquences des activités humaines présente un risque de biais d’évaluation. Dans notre cas, la luminosité nocturne, par définition, mesure la lumière produite la nuit par de l’éclairage, notamment l’éclairage public, mais n’a pas de rapport direct avec la consommation totale d’électricité dont elle représente généralement une faible fraction, et encore moins avec ses effets sur le développement socio-économique.  Si l’éclairage public pourrait avoir un impact sur la sécurité, et donc aussi sur l’activité économique, il ne saurait refléter qu’une fraction des conséquences de l’électrification sur les activités humaines.

 

Application : les mini-réseaux des Cafés Lumière ont un impact significatif à partir de 2021

La luminosité nocturne permet une détection d’impacts de l’électrification pratiquement en temps réel. Pour illustrer ce propos nous avons calculé la luminosité nocturne moyenne annuelle pour les 6 localités équipées et pour 6 localités comparables mais non-équipées, choisies par Electriciens sans frontières par tirage au sort pour former un groupe traité et un groupe témoin.

Les données ont été analysées en prenant en compte les contraintes suivantes :

  • Les différentes localités n’ont pas été équipées en même temps ;
  • La mise en place des Cafés Lumière a été progressive avec l’installation en priorité de la boutique avant la mise en service du mini-réseau. La boutique présentant par construction peu d’effet d’émission de lumière, c’est en testant l’effet de la mise en route du mini-réseau que l’on peut tester en premier lieu l’impact des Cafés Lumière ;
  • L’éclairage public alimenté par le mini-réseau est en fonctionnement aux heures de passage du satellite (ente 0h et 2h du matin dans notre cas) dans seulement 2 localités : Ambatonikolahy et Talata Dondona.

Figure 1. Évaluation de la luminosité nocturne (moyennes annuelles 2013-2022) dans les localités équipées et non équipées (radiance mesurée en w/cm2_sr)

Figure 1. Évaluation de la luminosité nocturne (moyennes annuelles 2013-2022) dans les localités équipées et non équipées (radiance mesurée en w/cm2_sr)

La Figure 1 montre une évolution parallèle de la luminosité nocturne moyenne des 6 villages équipés et de celle des 6 villages témoins jusqu‘en 2020, le premier groupe présentant au contraire des performances meilleures en 2021 et 2022. L’écart est d’environ 10% par rapport aux données antérieures, ce qui n’est pas très élevé compte tenu du faible niveau initial mais est statistiquement très significatif. Notre conclusion de cette Figure 1 est confirmée par un test statistique formellement plus rigoureux, qui utilise les données mensuelles par localité, en contrôlant pour les effets de la saisonnalité et des effets fixes propres à chaque localité traitée ou non traitée.  La mise en route du mini-réseau conduit à une augmentation de la luminosité nocturne comparable à celle révélée par la Figure 1 et statistiquement très significative.

Les craintes d’un biais dû à la présence de l’éclairage public ne sont potentiellement justifiées que dans le cas de 2 localités sur 6 (Ambatonikolahy et Talata Dondonna). Ces craintes ne sont pas totalement justifiées.  En effet, quand on essaie de prendre en compte conjointement la présence du mini-réseau et celle de l’éclairage public, cette dernière n’a aucun effet significatif. De plus quand on estime le même modèle en excluant ces 2 localités, les résultats obtenus, s’agissant de la significativité de l’impact des mini-réseaux, ne changent pas.

L’éclairage public n’a pas d’effet significatif dans nos tests, mais cela veut dire seulement qu’on ne peut pas démontrer qu’il en a un, ce qui est peut être dû à une faible puissance des tests statistiques mis en œuvre. De plus le biais peut exister à Ambatonikolahy et à Talata Dondona.

Nous avons mobilisé les données de l’opérateur Anka, qui reporte mois par mois les différentes composantes de la consommation d’électricité, en séparant la consommation pour l’éclairage public des autres consommations d’électricité, sachant que l’éclairage public créé a priori beaucoup plus de radiance, et donc de luminosité nocturne, que les autres consommations d’électricité. Cette propriété est amplement vérifiée dans nos données, et cela nous permet de calculer un ordre de grandeur du biais contenu dans les données de pour évaluer l’accès à l’électricité en présence d’éclairage public en milieu de nuit. Pour Ambatonikolahy et Talata Dondona, ce biais est de l’ordre de 40% en année pleine (2022). Il est donc souhaitable, quand cela est possible, de mobiliser des données complémentaires pour évaluer les impacts des mini-réseaux, ce que nous ferons dans les prochaines livraisons de ce blog.

 

Dans la même série “Mesurer l’impact des projets d’électrification décentralisée”, découvrez aussi les articles suivants : Les Cafés Lumière de Madagascar (1/4), Caractérisation des impacts sur l’accès à l’électricité à partir des données de localité (3/4), Caractérisation des impacts sur l’accès à l’électricité à partir des données de ménages (4/4).

 

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Innover dans l’investissement pour renforcer l’autonomisation des Femmes

Cet article a été co-écrit par Ksapa et Investisseurs & Partenaires, et est également publié sur leur site web.   La question du genre est au cœur du débat international….

Cet article a été co-écrit par Ksapa et Investisseurs & Partenaires, et est également publié sur leur site web.

 

La question du genre est au cœur du débat international. Lélimination de la discrimination des femmes et des filles, l’autonomisation des femmes et la parité entre femmes et hommes sont considérés comme des facteurs clefs du développement, du respect des droits humains, de la paix et de la sécurité mondiale. Les Objectifs de Développement Durable ont d’ailleurs réaffirmé ce rôle clef de l’autonomisation des femmes dans le jeu démocratique, pour prendre les décisions qui s’imposent dans sur tous les aspects du développement durable.  

Pour étudier les implications de l’autonomisation des femmes pour le secteur privé, Ksapa s’est rapproché d’Investisseurs & Partenaires, spécialiste de l’investissement à impact sur le continent africain. Ensemble, nous examinons les données du défi de l’autonomisation de la femme, particulièrement prégnant en milieu rural à travers le continent africain. Comment, dans les conditions actuelles, adapter les plans d’action sur le genre des investisseurs et des entreprises pour mieux répondre au défi ? Forts des différentes initiatives que nous menons, Ksapa et I&P tirent des recommandations pratiques pour la mobilisation du capital et les technologies disponibles en faveur de l’autonomisation des femmes.

 

1. Grands enjeux de l’autonomisation des femmes

L’autonomisation des femmes implique, en essence, une distribution équitable des ressources entre les hommes et les femmes, les filles et les garçons. Voilà pour le principe. En pratique, l’autonomisation des femmes bouscule des comportements sociaux très ancrés, qui se traduisent dans des décisions sociales, économiques et culturelles tout aussi structurelles.

  • Des disparités structurelles entre hommes et femmes

De fait, hommes et femmes, garçons et filles ne sont pas égaux face à la pauvreté et dans l’accès aux opportunités d’avancement – et ce, d’autant moins dans le contexte des crises climatiques, sanitaires et socio-économiques actuelles. Les femmes ne représentent qu’un tiers ou moins de la richesse en capital humain dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire inférieur. En Asie du Sud, les pertes liées aux inégalités de genre sont estimées à 9 100 milliards de dollars, contre 6 700 milliards de dollars en Amérique latine et dans les Caraïbes et 3 100 milliards de dollars au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. En Afrique subsaharienne, elles atteignent 2 500 milliards de dollars.

À ce titre, l’OCDE publie un indice des institutions sociales et égalité entre hommes et femmes pour mesurer, à l’échelle internationale, les discriminations à l’encontre des femmes dans les institutions sociales. Pour exemple, en 2019, cet indice était de 37.0 au Sénégal, 42,8 en Côte d’Ivoire et 34,5 au Ghana.

  • Impacts socio-économiques de l’autonomisation de la femme

Pour autant, et bien qu’elles fassent l’objet de préjugés, les femmes contrôlent actuellement 32% de la richesse, ajoutant ainsi 5 000 milliards de dollars à la richesse mondiale chaque année. Le tout à un rythme beaucoup plus rapide que par le passé. En outre, pour chaque dollar d’investissement levé, les jeunes entreprises appartenant à des femmes génèrent 0,78 dollar de revenus, contre 0,31 dollar pour les entreprises dirigées par des hommes. Ainsi, la parité entre hommes et femmes sur le marché du travail pourrait générer une hausse de 26% du PIB mondial annuel d’ici à 2025.

  • Zoom sur la femme dans le secteur agricole africain

L’agriculture en particulier représente près de 25 % du PIB de l’Afrique et les femmes constituent près de la moitié de la main d’œuvre de ce secteur en Afrique subsaharienne. Sur l’ensemble du continent, l’agriculture s’avère même le tout premier employeur des femmes, concentrant 62 % des femmes actives. Dans certains pays, comme le Rwanda, le Malawi et le Burkina Faso, elles sont même plus de 90 % à y travailler.

Le travail des femmes est, comme ailleurs, sujet à des disparités critiques – notamment en termes de répartition des tâches et de prépondérance du travail informel. Dans le milieu agricole africain, les femmes tendent à opter pour des cultures et techniques spécifiques et leur travail n’est pas rémunéré de la même façon.

Lorsqu’il fait l’objet d’un contrat, il ne porte pas systématiquement leur nom – et souvent celui de leur mari. De même, les agricultrices africaines ont tendance à investir les marchés locaux et le commerce de détail, là où les hommes misent davantage sur le commerce de gros, avec une portée régionale.

 

2. Intégrer une solide perspective du genre dans les stratégies d’investissements à impact

La lutte contre la pauvreté et la sécurité alimentaire dépendent directement du développement de solutions systématiques pour l’autonomisation des femmes. Les mesures nécessaires pour développer des moyens de subsistance stables grâce au secteur agricole africain incluent donc des dispositifs innovants d’accès à la terre, au capital et moyens de production – en particulier pour les femmes.

C’est précisément pourquoi la Banque mondiale a élaboré une stratégie de genre à destination des développeurs de projets internationaux. Le document liste 4 leviers clefs pour diminuer les écarts entre hommes et aux femmes :

  • Sensibilisation : Améliorer les écarts entre hommes et femmes en réduisant notamment les différentiels d’accès à la santé, l’éducation et la protection sociale (par exemple, les transitions école/travail, les stéréotypes sexistes sur le lieu de travail, les droits en matière de santé sexuelle et génésique…).
  • Opportunité : Supprimer les barrières à un emploi plus important et de meilleure qualité, en stimulant la participation des femmes, les opportunités pour elles de générer leurs propres revenus et d’accéder aux actifs productifs (en gardant à l’esprit les considérations clés de la charge des soins, de l’accès à la mobilité et à l’emploi formel…).
  • Capacité d’action : Renforcer l’expression des femmes et les mettre en capacité d’agir, en incitant les hommes et garçons à partager avec elles les décisions sur la prestation de services, la réduction des violences sexistes et la gestion de situations conflictuelles.
  • Propriété : Supprimer les obstacles à la propriété et au contrôle des biens par les femmes, en améliorant l’accès des femmes à la terre, au logement et à la technologie.

En s’appuyant sur cette stratégie, les investisseurs, et en particulier les équipes de développement, sont amenés à examiner les modalités de dialogue avec les parties prenantes potentiellement impactées, afin d’identifier et évaluer les écarts concrets entre les genres. Autant d’efforts qui débouchent sur le développement d’un plan d’action en matière de genre.

 

3. Exemples pratiques de la mobilisation du capital pour l’autonomisation des femmes

  • Zoom sur 3 entreprises du secteur agricole soutenues par I&P 

I&P est engagé depuis 20 ans pour financer et accompagner l’émergence de champions de l’entrepreneuriat africain. En tant qu’investisseur d’impact, I&P vise un retour social et/ou environnemental positif ainsi qu’une performance financière significative dont l’impact est mesurable par un processus continu d’évaluation.

Cette approche porte à la fois dans le choix d’investissements ciblés et dans l’accompagnement des entreprises sélectionnées. L’accompagnement se caractérise également par la mesure de l’impact social et/ou environnemental de l’entreprise, sur la base d’objectifs prioritaires et de modalités de suivi des progrès sur les impacts positifs escomptés. Dans le cadre de sa stratégie genre1, I&P cherche activement à développer un pipeline de PME, soit gérées par des femmes, soit à fort impact pour les femmes.

I&P inclut donc systématiquement des plans d’action spécifiques au genre dans le plan d’action ESG des entreprises en portefeuille (augmentation du nombre d’emplois féminins, accès à des postes de direction, formations spécifiques…). À date, 33% des entreprises accompagnées par la famille I&P sont dirigées par des femmes. De même, 79% du portefeuille d’I&P répond à au moins un critère du 2X Challenge, une initiative des banques de développement pour définir ce qui serait considéré comme un investissement favorable aux femmes.

Au sein du portefeuille d’I&P, plusieurs entreprises illustrent comment une perspective de genre peut être développée dans le secteur agriculture, comme :

    • Soafiary (Madagascar) :Fondée en 2006 par la promotrice malgache Malala Rabenoro, Soafiary est spécialisée dans la collecte, la transformation et la vente de céréales (maïs, riz) et de légumineuses (haricots, pois du cap, lentilles, soja) sur le marché local et international.
    • Citrine (Côte d’Ivoire) :Citrine Corporation est une entreprise spécialisée dans la transformation du manioc en attiéké frais (semoule de manioc) et en placali (pâte de manioc) au sud de la Côte d’Ivoire, plus précisément à Grand-Bassam.
    • Rose Eclat (Burkina Faso) :Entreprise familiale créée en 1999 par Rosemonde Touré, Rose Eclat est une société de transformation de fruits et légumes. Aujourd’hui, l’entreprise met sur le marché national et international des fruits et légumes transformés et/ou séchés certifiée biologique et conforme à la méthode de gestion de la sécurité sanitaire des aliments (HACCP). L’entreprise produit principalement de la mangue mais aussi des bananes, des gombos, des fraises ou encore des oignons.

Emblématiques de l’action d’I&P en matière d’autonomisation des femmes dans le secteur agriculture, ces trois entreprises se sont engagées à appliquer une politique favorable à l’égalité des genres et à l’autonomisation des femmes. L’une d’entre elles, Soafiary, a retranscrit cette politique en une feuille de route résumant tous ses engagements en matière d’égalité et d’autonomisation des femmes. Cette feuille de route écrite sert à tracer les grandes lignes de la politique genre de l’entreprise, et est surtout un outil concret de suivi et d’évaluation que ce soit en interne ou en externe des avancés et des efforts qui ont été fait par l’entreprise en matière d’égalité homme-femme.

Les trois entreprises priorisent le recrutement des femmes aux emplois saisonniers et n’appliquent aucune forme de discrimination sexuelle pour les recrutements aux emplois fixes. Les femmes y sont également impliquées dans le processus de prise de décision et occupent divers postes à responsabilité. Ainsi, les hommes et les femmes ont les mêmes égalités de chance d’avancement professionnel – soit via l’accès à des emplois fixes ou à emplois saisonniers, et ce avec des rémunérations comparables. Les femmes bénéficient en outre de formations sur leurs lieux de travail.

Rose Eclat en particulier donne l’opportunité aux femmes de se former en dehors de l’entreprise en vue d’un avancement professionnel ou qui leurs permettront plus tard de se mettre à leurs comptes.

Les trois entreprises veillent de plus au respect des droits à l’intégrité physique et morale des femmes sur et en dehors de leurs lieux de travail et les donnent accès à des soins de santé et à la protection sociale. Soafiary a également mis en place un système d’inclusion financière et de bancarisation des femmes. L’accès à des produits et services financiers permet aux femmes d’anticiper le financement d’objectifs à long et moyen terme ou de faire face à des imprévus. Par ailleurs, l’épargne encourage le crédit, et inversement.

  • Zoom sur l’approche SUTTI de Ksapa

Misant particulièrement sur ce levier de la formation, Ksapa a lancé l’initiative Scale-up Training, Traceability, Impact initiative (SUTTI) pour le développement de chaînes d’approvisionnements agricoles responsables. Nous proposons pour cela aux petits exploitants agricoles l’accès à de la formation et de l’éducation technique et opérationnelle. Ainsi nous visons l’optimisation des cultures et la production économique agricole, l’amélioration de la qualité des moyens de subsistance des agriculteurs en augmentant les revenus, en diversifiant les activités et en réduisant la pauvreté et enfin la parité entre hommes et femmes. Et ce, notamment pour retenir les jeunes fermiers dans les zones rurales.

Grâce au développement de notre propre application numérique, nous combinons l’analyse et l’évaluation, la structuration de la coalition et le calibrage du pilote et la mise en œuvre du programme et le suivi de l’impact. C’est ainsi que Ksapa mesure l’impact de l’initiative SUTTI et particulièrement les impacts spécifiques liés aux femmes, principalement leur inclusion dans le programme. Via la formation, nous soutenons l’autonomisation des femmes, en ouvrant la division conventionnelle du travail et le potentiel des femmes à vendre et gérer le produit de leur travail et à exploiter des activités de revenus diversifiées.

Parce que les femmes subissent de plein fouet le manque d’inclusion financière, d’alphabétisation et de compétence numérique, notre solution vise une accessibilité optimale de ces dernières. Nos programmes étant centrés la diversification des revenus des petits producteurs agricoles, ils développent par là même un levier additionnel d’autonomisation des femmes en milieu agricole. En somme, cette approche vise à débloquer 4 défis clefs de la manière suivante :

DEFIS CLEFS  SOLUTIONS PERTINENTES
Faible productivité due au manque d’accès à l’information et aux services, au changement climatique, à la variabilité des conditions météorologiques et aux épidémies de parasites et de maladies.  Sensibilisation aux bonnes pratiques agricoles (BPA) : dispenser des sessions en face à face et numériques pour encourager la génération de revenus via l’efficacité de l’eau, le crédit carbone et la diversification des cultures. Via une application numérique, il est possible de partager des vidéos et des tutoriels qui soutiennent des tests pratiques et la mise en œuvre des BPA à l’échelle de toute l’exploitation. Développer les outils d’aide à la décision : les applications numériques peuvent inclure une fonction de chat communautaire permettant aux petits exploitants agricoles de partager leurs questions et de décider de la meilleure façon de mettre en œuvre les BPA. Une fonction de marketplace offre aux petits exploitants agricoles l’opportunité de partager des informations sur les prix et volumes pour pouvoir décider où et quand vendre. Lever les barrières de langue et de culture numérique : Adapter les solutions aux besoins des petits exploitants agricoles implique notamment de traduire les contenus dans les langues locales – en intégrant une fonction de synthèse vocale à destination des fermiers moins lettrés.
 Manque d’accès à des produits financiers et d’assurance adaptés Développer des solutions financières pour les petits exploitants, payées par exemple avec des jetons émis via un système de compensation carbone.
L’accès des femmes aux services numériques  Organisation des groupes de formation féminins (par exemple, recruter une cohorte exclusivement féminine sur trois) pour identifier et répondre aux besoins spécifiques des agricultrices. Adapter le contenu en conséquence (par exemple, en incluant une perspective de genre, notamment dans les contenus de formation sur la santé-sécurité sur la ferme).
Manque d’accessibilité et de capacité à sélectionner les marchés et modalités de vente  Structurer l’approvisionnement des petits producteurs agricoles en intrants, payés via un système de compensation carbone et les revenus d’un outil de gamification les incitant à répondre régulièrement à des questionnaires de suivi d’impact. Favoriser l’accès au marché en soutenant la diversification des cultures tout au long de l’année en dehors du cycle de production de la culture prédominante des fermiers concernés. Conforter les outils d’aide à la décision avec un module qui permettre aux petits exploitants agricoles d’identifier de nouveaux modes de commercialisation, suivre leurs transactions et identifier les meilleures options pour acheter/vendre leurs cultures

 

Conclusion 

A la tête de leurs programmes à impact respectifs, I&P et Ksapa tirent ensemble 5 grands enseignements pour l’intégration d’une solide perspective de genre :

  • Prioriser les questions d’autonomisation des femmes dans le développement de projets de développement agricole
  • Formaliser les contributions directes et indirectes du secteur agricole aux dynamiques de genre
  • Clarifier les rôles et responsabilités pour le développement d’une robuste perspective du genre
  • Attribuer des ressources spécifiques à l’autonomisation des agricultrices
  • Développer des mécanismes de dialogue et de remontée des griefs propres aux agricultrices
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SOAFIARY : l’exemple concret d’une entreprise malgache socialement responsable

Une entreprise peut être beaucoup plus qu’un simple acteur économique et jouer un véritable rôle sociétal, transformant l’environnement dans lequel elle opère. L’entreprise malgache Soafiary le démontre sur plusieurs points,…

Une entreprise peut être beaucoup plus qu’un simple acteur économique et jouer un véritable rôle sociétal, transformant l’environnement dans lequel elle opère. L’entreprise malgache Soafiary le démontre sur plusieurs points, étudiés dans cet article. Depuis sa création en 2006, cette entreprise de l’agrobusiness a intégré son engagement social au cœur de son modèle d’affaires.

 

Créée et dirigée par une femme engagée, Malala Rabenoro, Soafiary est spécialisée dans la collecte, la transformation et la vente de céréales et légumineuses sur le marché local et international. À partir de 2017, elle diversifie son activité en opérant dans la production et la commercialisation de provendes animales ainsi que dans l’exploitation agricole à travers un projet d’agriculture contractuelle en collaboration avec le diocèse de la région.

Son site d’exploitation est situé en zone rurale, à 22km d’Antsirabe dans la région Vakinankaratra, localisée dans les hauts plateaux et connue comme étant le « fermier » de Madagascar. Cette région n’est pas épargnée par la situation de précarité qui sévit dans le pays, avec un taux d’alphabétisation extrêmement faible, un déficit d’infrastructures et un taux de pauvreté élevé. Ces enjeux à la fois sociaux et économiques constituent des défis à relever. Il parait évident pour Soafiary d’y contribuer, en tant qu’acteur soucieux du développement de sa région, et plus largement de Madagascar.

 

Favoriser l’emploi auprès d’une population défavorisée, faiblement scolarisée

La population locale vit majoritairement de l’agriculture de subsistance ou de l’élevage. Faute de moyens, elle peine souvent à produire suffisamment pour assurer l’autosuffisance, et encore moins pour développer son activité. Et faute d’éducation, elle ne peut prétendre à des postes qualifiés dans les entreprises.

Soafiary s’est engagée à contribuer à l’intégration professionnelle de cette population éloignée de l’emploi. Dans ce contexte, elle emploie près de 200 personnes, dont la majorité sont des locaux, engagés pour les travaux de champs, le triage manuel des légumineuses et le conditionnement des produits. Au niveau de l’activité de triage et de conditionnement, le choix a été de les faire manuellement, même si l’automatisation est possible. Ce choix du triage manuel, par opposition au triage automatique opéré par des machines, permet de créer plus d’emplois.

La contribution de Soafiary se concrétise également par l’aide financière sous forme de prêts octroyés aux employés. L’objectif est qu’ils puissent développer une autre activité génératrice de revenu. La majorité se lance dans l’élevage, l’agriculture ou le commerce de produits de première nécessité. C’est ainsi que Soafiary offre à la communauté environnante l’opportunité d’améliorer leur condition économique à travers l’accès à un double emploi.

Soafiary s’engage à contribuer à l’intégration professionnelle d’une population locale éloignée de l’emploi, vivant majoritairement de l’agriculture de subsistance.

Accompagner les employés sur les questions d’alphabétisation et d’hygiène

Soafiary compte parmi ses employés 21% d’illettrés, 46% ayant atteint le niveau primaire et 25% ayant accompli l’éducation secondaire de premier cycle. Engager des personnes faiblement scolarisées issues du monde rural est un réel engagement de l’entreprise, qui a mis en place un accompagnement poussé afin de leur permettre l’assimilation des gestes clés utiles à la production, l’apprentissage des mesures d’hygiène et des compétences fondamentales telles que la lecture et l’écriture.

Sur les questions d’hygiène, Soafiary réalise de manière régulière des sensibilisations à l’hygiène corporelle, à l’usage correct du bloc sanitaire et à l’hygiène de l’eau à ses employés, qui ne sont familiers à aucune de ces approches.

En ce qui concerne l’alphabétisation, les actions entreprises se centralisent sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour que les employés puissent être capables de vérifier leur fiche de paie, à travers l’identification et la validation des informations leur concernant notamment leur nom et prénom, la vérification du montant inscrit, pour ensuite y apposer leur signature si la fiche leur est satisfaisante. Ceci a permis d’instaurer un climat de confiance et d’échange au sein de la société.

Ces actions paraissent basiques mais leur mise en place n’est pas facile et prend du temps. C’est grâce au profil atypique de la directrice de production, Agnès Randrianampizafy, enseignante de formation, que l’accompagnement est rendu possible avec le soutien et l’engagement de toute l’équipe. « Il faut être pédagogue, patient et savoir inculquer une discipline » souligne-t-elle.

 

Soutenir, accompagner et former les petits producteurs à travers le projet Soadio (SOAfiary – DIOcèse)

Le secteur de l’agro business fait face à plusieurs grands enjeux et doit résoudre l’équation entre l’inclusion des petits producteurs, le respect de l’environnement, la qualité des produits et la compétitivité des prix, le tout dans un environnement où la concurrence internationale est forte.

Soafiary tente de répondre à ces enjeux à travers son projet Soadio, un modèle d’agriculture contractuelle responsable qui consiste à former les petits producteurs et à mettre à leur disposition les matériels agricoles ainsi que les intrants nécessaires à l’exploitation des 4 100 Ha de terrain appartenant au Diocèse de la région Vakinankaratra. À partir de 2017, date de lancement du projet, 380 Ha ont été exploités dont la totalité de la production est achetée par Soafiary.

Le projet est un vrai levier socio-économique pour la région. Il vise à l’amélioration de la condition de vie des petits producteurs à Morarano, une commune rurale située à 200 km du site d’exploitation de Soafiary, où sont localisés les terrains du Diocèse. Il permet également l’inclusion des petits producteurs dans la chaîne de valeur de Soafiary, qui assurent désormais l’approvisionnement. La stratégie consiste pour Soafiary à apporter les marchés et l’accompagnement nécessaire pour que les petits producteurs puissent fournir les matières premières. Plus largement, Soafiary joue le rôle de catalyseur pour le développement de l’agrobusiness dans la région avec l’intégration des petits producteurs ruraux dans la chaine de valeur de la production des céréales et grains secs, en plus de coordonner la synergie des actions entre les différents acteurs de la filière à savoir : Diocèse, producteurs, partenaires techniques, financiers et institutionnels et clients.

Soafiary joue le rôle de catalyseur pour le développement de l’agrobusiness dans la région Vakinankaratra, permettant l’intégration des petits producteurs ruraux dans la chaine de valeur de la production des céréales et grains secs

Ce partenariat inclusif entre Soafiary et le Diocèse est un pas en avant vers une cohésion sociale et humanitaire, qui n’est qu’un préalable pour le lancement de différents projets : mise en place d’un système d’irrigation, renforcement des terrains pour lutter contre l’érosion, renforcement du centre de santé de base par l’octroi de matériels médicaux, amélioration de l’unique école du village par l’extension des salles de classe, appui des centres de formations agricoles, pour n’en citer que quelques-uns.

 

Soafiary démontre qu’intégrer les engagements sociaux au cœur des activités peut être bénéfique pour l’entreprise. Cette démarche lui a permis de gagner plus d’engagement de la part de ses employés en contrepartie des appuis octroyés, mais aussi et surtout, de construire un modèle d’agriculture contractuelle responsable sécurisant son volume d’approvisionnement tout en répondant aux enjeux de qualité et de traçabilité des produits.

 

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Matthieu Lougarre “Plus que la vanilline synthétique, c’est la législation sur l’étiquetage des produits qui est problématique”

ENTRETIEN. Matthieu Lougarre, Directeur général d’Agri Resources Madagascar croit en l’avenir de la vanille et en sa région d’origine, la SAVA. A condition que la qualité de la vanille malgache…

ENTRETIEN. Matthieu Lougarre, Directeur général d’Agri Resources Madagascar croit en l’avenir de la vanille et en sa région d’origine, la SAVA. A condition que la qualité de la vanille malgache soit reconnue et protégée.

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A Madagascar, quel avenir pour la vanille ? L’or noir en péril

Devenue l’épice la plus chère au monde après le safran, la vanille est un enjeu décisif à Madagascar, d’où provient plus de 80% de la vanille produite au niveau mondial….

Devenue l’épice la plus chère au monde après le safran, la vanille est un enjeu décisif à Madagascar, d’où provient plus de 80% de la vanille produite au niveau mondial. Produite essentiellement dans la région SAVA, au nord-est du pays, l’orchidée devenue un véritable or noir ferait vivre entre 80 000 et 100 000 cultivateurs. Un eldorado de courte durée. Depuis plusieurs années, la filière vanille est cernée par les difficultés : corruption, flambée des prix, dégradation de la qualité,  insécurité, risques naturels et concurrence de la vanille synthétique.

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