Penser et agir pour l’entrepreneuriat en Afrique

Éclairages

Des articles qui permettent de mieux comprendre certains enjeux d’actualité et de fond liés à l’entrepreneuriat africain: le contexte politique, les perspectives économique, des enjeux sociaux-culturels…

Digitalisation au service de la filière anacarde : le défi de Wi Agri

Leader mondial de la production brute de noix de cajou avec la barre symbolique du million de tonnes d’anacardes récoltés en 2020, la Côte d’Ivoire n’est pourtant que troisième sur…

Leader mondial de la production brute de noix de cajou avec la barre symbolique du million de tonnes d’anacardes récoltés en 2020, la Côte d’Ivoire n’est pourtant que troisième sur le marché mondial de transformation de l’anacarde avec seulement 2,3%, bien loin derrière les deux mastodontes asiatiques que sont le Vietnam et l’Inde qui, ensemble, cumulent plus de 80% des parts du marché mondial.

Actuellement, 1,5 millions de personnes sont directement engagées dans la chaîne de valeur anacarde ivoirienne : 500.000 producteurs (dont 20% de femmes) et 1 millions de travailleur(r/se)s agricoles, essentiellement des ramasseuses. Le pays est le premier producteur mondial de noix de cajou avec une production se stabilisant autour du million de tonnes par an depuis 2020 grâce notamment à une réforme engagée et mise en œuvre dans le secteur agricole depuis 2013. Cette réforme ayant permis à la Côte d’Ivoire de passer d’une production de 400.000 tonnes en 2011 à 970.000 tonnes en 2021.

Là où ces efforts de production sont à saluer, seuls 10 à 20% des anacardes produits sont transformés localement. La Côte d’Ivoire en exporte en effet plus de 800.000 tonnes  par an sous forme de noix brutes, soit plus de 40% de l’offre mondiale, faisant de l’anacarde le deuxième produit agricole d’exportation ivoirienne tant en volume qu’en valeur. L’anacarde brute est exporté vers l’Asie, au Vietnam et en Inde, où il est transformé et ré-exporté vers des pays à forts pouvoirs d’achat : aux USA, en Europe et au Moyen Orient, où la demande n’a pas connu de ralentissement malgré la période Covid, contrairement à d’autres produits agricoles.

La politique nationale ivoirienne et sa stratégie économique pour 2025 vise à faire passer la part de la production transformée localement de 10 à 50%, avec un impact considérable en matière de création de valeur et de création d’emplois, particulièrement féminines et en milieu rural. Objectif ambitieux mais non moins réaliste si le pays relève les nombreux défis que cela implique.

 

Une passerelle numérique entre l’offre et la demande

Chaque année, ce sont près de 20% de la production totale de noix de cajou brutes qui sont exportées de manière illicite vers les pays limitrophes de la Côte d’Ivoire, notamment vers le Ghana. Depuis l’instauration d’une taxe sur l’exportation des noix brutes pour encourager la transformation locale il y a une dizaine d’années, la contrebande d’anacardes a explosé justement parce que cette nouvelle politique de taxation n’a pas été suivie par les pays voisins de la Côte d’Ivoire. Les noix brutes sont collectées et acheminées illégalement vers le port de Tema au Ghana où les dépenses portuaires sont inférieures à celles appliquées à Abidjan.

Si une taxation homogène de la filière anacarde au niveau de la CEDEAO permettrait à terme d’endiguer ce phénomène d’exportation illicite, en parallèle, il y a une véritable nécessité à mettre en place des mesures concrètes d’accompagnement pour que l’offre de noix brutes rencontre les demandes des unités de transformation locales. 

Alternative intéressante et qui commence à faire ses preuves dans d’autres filières agricoles, les technologies digitales au service de l’agriculture (D4ag) permettent aux producteurs et aux entrepreneurs du secteur agroalimentaire d’accroître leur productivité, leur efficacité et leur compétitivité, de faciliter l’accès aux marchés, d’améliorer les résultats nutritionnels et de renforcer la résilience au changement climatique.

La Plateforme digitale Wi-Agri s’est fixée pour challenge de contribuer à la réussite de la stratégie nationale ivoirienne en modernisant l’accès au marché et aux services financiers et non financiers pour les petits producteurs d’anacarde et en permettant aux PME ivoiriennes de s’appuyer sur la digitalisation pour apporter à l’échelle, des relations commerciales rapides, sécurisées et transparentes aux petits producteurs et aux coopératives qui les encadrent. 

D’ici 2025, la plateforme Wi-Agri projette d’atteindre 500 000 utilisateurs dont 100 000 femmes, et de créés 20 000 emplois.

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Les PME africaines ont le potentiel d’être à la pointe du digital de demain

  Cela fait plus de 15 ans que j’accompagne des entreprises sur le continent dans leurs stratégies digitales et je crois fondamentalement au potentiel des PME africaines d’être à la…

 

Cela fait plus de 15 ans que j’accompagne des entreprises sur le continent dans leurs stratégies digitales et je crois fondamentalement au potentiel des PME africaines d’être à la pointe du digital de demain.
Pourquoi ?

Tout d’abord parce qu’il y a un retard technologique.

Quand on parle de digital en Afrique, le constat aujourd’hui reste que les usages sont encore limités. Seuls 36% de la population africaine étaient connectée en Janvier 2023. Les progrès technologiques sont freinés par des questions structurelles (manque d’infrastructures, faible connectivité internet, faiblesses des réseaux électriques), mais aussi des questions d’ordre sociétales (pouvoir d’achat limité, populations éloignées de l’écrit, etc.)
Mais ce retard technologique est, par bien des égards, une chance.

En effet, ce que l’on voit c’est que les derniers arrivés ont tendances à adopter directement les usages les plus avancés. Les nouveaux arrivant sur Internet vont par exemple immédiatement utiliser l’intelligence artificielle – déjà via la reconnaissance vocale sur leur smartphone – et cela leur semblera normal.

C’est ce qu’on appelle le Frogleap : Un saut de grenouille qui permet aux entreprises africaines de passer directement de l’artisanat à l’industrie Web 4.0 !

Deuxièmement parce que ces entreprises évoluent dans des contextes difficiles.

Enjeux politiques, économiques, sociaux, réglementaires, environnementaux : le contexte est souvent difficile pour les entreprises africaines – plus difficiles qu’ailleurs.
Ici encore c’est une chance ! Parce que l’innovation nait de la contrainte.

En effet, pourquoi changer quelque chose qui fonctionne ? Oui, on pourrait faire mieux, mais par essence personne n’aime le changement…
C’est le principal frein auquel se se heurtent les projets de transformation dans les entreprises françaises par exemple.

On connait tous la difficulté à faire changer des habitudes établies. Alors que face à un problème ou un blocage, on est prêt à tout pour trouver une solution.

L’exemple le plus flagrant est le cas du mobile money qui représente plus de 36 milliards de transactions en Afrique subsaharienne – contre seulement 300 millions en Europe et Asie Centrale (source : GSMA 2021).
Pourquoi est ce que ces usages peinent à décoller en Europe et en Asie Centrale ? Parce que le marché est déjà équipé de cartes bancaires et que de fait, si le paiement mobile apporte un plus, il ne vient pas répondre à une vraie tension.

Intéressant de voir ici d’ailleurs comment ces innovations impactent la manière de mesurer le niveau de développement d’un pays – Avec le mobile money par exemple, le taux de bancarisation n’est plus forcément aussi représentatif …

Enfin parce que les PME Africaines sont souvent des structures jeunes aux moyens limités

Aussi surprenant que cela puisse paraître, cela peut aussi être une chance pour le digital.
En effet, la digitalisation n’est plus aujourd’hui tellement une question de budget, mais plus une question de culture.

L’essor du no-code a démocratisé l’accès à la digitalisation pour les entreprises.

Des applications telles que Notion ont permis à des entreprises comme Sayna, à Madagascar, de digitaliser l’ensemble de leur process sans nécessiter d’expertises techniques particulières ou de budgets importants.
Les médias sociaux permettent eux de toucher facilement une audience locale et internationale.
De plus, il est plus facile pour des structures jeunes et plus petites de tirer partie du digital.
Plus agiles que les grands groupes aux pratiques établies, elles peuvent faire évoluer leurs outils et pratiques pour mettre en place de nouvelles méthodes de travail plus adaptées.

Une capacité d’adaptation qui est une réelle force dans un contexte de fortes incertitudes, notamment sur les sujets énergétiques et climatiques.

Autant de raisons pour les PME Africaine d’embrasser avec confiance une transformation digitale qui peut être un vrai levier de développement.

ll est important cependant de garder à l’esprit :

L’humain : Le digital ne doit pas venir remplacer, mais bien “augmenter” l’humain. Il s’agit de ne pas penser le digital pour le digital, mais pour apporter une valeur ajoutée. Et ainsi améliorer, simplifier, fluidifier des relations avant tout humaines, que ce soit à l’intérieur des entreprises ou avec leurs clients et partenaires. Il est intéressant à ce titre de voir dans les interfaces numériques l’importance croissantes des usages conversationnels qui sont celles qui sont les plus proches des interactions humaines (ex. WhatsApp ou ChatGPT)

Les spécificités africaines : Il s’agit d’une part d’assurer une meilleure représentation des réalités du continent dans les différents outils digitaux. En effet la réalité proposée en ligne dans les résultats de Google, sur les médias sociaux, ou encore dans les productions images ou textes générées par les Intelligences Artificielles sont le miroir des contenus disponibles en ligne – contenus qui sont avant tout américains, asiatiques, européens ..- Il s’agit pour cela d’encourager la production de contenus Africains afin que les spécificités du continent soient elles aussi prises en compte dans le futur.

Et d’autre part, alors que les principaux acteurs du digital aujourd’hui sont américains ou chinois, il faut éviter que la digitalisation ne crée des relations de dépendances trop fortes pour les pays. Une question que l’Afrique partage avec bien d’autres géographies !

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La santé des jeunes dans les pays d’Afrique sub-saharienne : un enjeu majeur dans l’optique des objectifs du développement durable

Portrait des étudiants de l’université de Lomé au Togo : des besoins de santé importants, mais des difficultés d’accès aux soins.

Portrait des étudiants de l’université de Lomé au Togo : des besoins de santé importants, mais des difficultés d’accès aux soins.

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Une expérience de la SFI et du Groupe de la Banque mondiale pour mobiliser le secteur privé en faveur du développement

Les flux financiers privés vers les marchés émergents et les économies en développement (MEED) sont aujourd’hui plus faibles qu’en 2015, lorsque le Programme d’action d’Addis-Abeba des Nations unies et l’Accord…

Les flux financiers privés vers les marchés émergents et les économies en développement (MEED) sont aujourd’hui plus faibles qu’en 2015, lorsque le Programme d’action d’Addis-Abeba des Nations unies et l’Accord de Paris ont été adoptés – engageant le monde à financer les ODD et à réduire les émissions de carbone. Les attentes étaient-elles simplement irréalistes ? Comment pouvons-nous espérer être à la hauteur du défi de notre génération ?

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Au Mali, une entreprise spécialisée dans le karité trace un exemple pour le continent

Jérémie Malbrancke et Simbala Sylla reviennent sur l’histoire de Mali Shi, entreprise malienne fondée en 2019 et premier transformateur industriel de karité dans le pays. L’histoire d’une entreprise engagée et…

Jérémie Malbrancke et Simbala Sylla reviennent sur l’histoire de Mali Shi, entreprise malienne fondée en 2019 et premier transformateur industriel de karité dans le pays. L’histoire d’une entreprise engagée et déterminée, qui permet de développer une filière créant des milliers d’emplois et valorisant des ressources locales.  

Le Mali reprend peu à peu sa place commerciale et financière en Afrique de l’Ouest depuis la levée des sanctions de la Cedeao en juillet. À la suite de la prise de pouvoir de la junte d’Assimi Goïta, l’organisation des États ouest africains avait imposé, avec ses membres, la fermeture des frontières, la suspension des échanges commerciaux et financiers et le gel des avoirs de la Banque centrale. 

Dans ce contexte redevenu favorable, l’usine Mali Shi, première unité industrielle de transformation de karité au Mali, peut reprendre sa trajectoire de développement. Avant l’installation de cette usine, le Mali, deuxième producteur mondial de noix de karité avec 250 000 tonnes par an, derrière le Nigeria, se trouvait dans une situation absurde où la totalité de la production était expédiée brute vers la Côte d’Ivoire, le Sénégal, et le Ghana, qui exportent eux-mêmes vers l’Europe des amandes et du beurre. 

Au total, le marché mondial draine entre 400 000 et 500 000 tonnes de beurre par an, représentant environ le double de noix brutes. Le beurre de karité est utilisé à plus de 85% dans l’agro-alimentaire, essentiellement pour remplacer une partie du beurre de cacao à moindre coût dans la fabrication de chocolat. Un marché en pleine croissance et une véritable aubaine pour le Mali pour un grand nombre de raisons. 

D’abord parce que cette activité repose avant tout sur les femmes. Dans le sud du Mali, ce sont elles qui récoltent les noix de karité à la fin de la saison des pluies. Après deux années d’activité, Mali Shi travaille avec une soixantaine de coopératives et déjà 26 000 femmes dans les régions de Kayes, Koulikoro, Ségou et Sikasso. L’objectif est de pouvoir travailler à terme avec 120 000 femmes, à pleine capacité. L’usine, qui emploie 97 personnes, a acheté 1 600 tonnes de noix en 2020, et 7 700 tonnes en 2021 et cible 30 000 tonnes d’ici deux ans. 

Une aubaine également car les activités de Mali Shi ont permis un grand nombre de retombées sociales positives. L’usine a financé la mise en place d’unions, en partenariat avec la Banque Mondiale, l’ONU femmes ou la Global Shea Alliance. Ces instances ont permis d’organiser les assemblées constitutives des coopératives dans les villages, d’accompagner les organisations dans les procédures de formalisation légale auprès des autorités, de diffuser les bonnes pratiques de collecte, de production et de stockage … mais aussi de former des leaders en gestion comptable, en marketing et négociation commerciale. Dans certaines zones, cet accompagnement a permis de multiplier par sept les volumes de noix récoltés d’une année à l’autre. 

Pour Mali Shi, le défi consiste désormais à assurer la continuité de l’approvisionnement en quantité et en qualité, en étroite coopération avec les communautés. Mali Shi dispose d’une équipe dédiée à l’approvisionnement, constituée de chefs de zone et d’agents présents en permanence sur le terrain, qui travaillent en étroite collaboration avec les femmes et leurs organisations. Pour sécuriser la chaîne d’approvisionnement, des contrats sont signés avec toutes les organisations de production partenaires, en s’accordant sur des quantités et des prix fixés. Il s’agit souvent de l’unique source de revenu pérenne pour les femmes partenaires de l’usine. Enfin, Mali Shi maintient les liens avec ses fournisseurs même en en dehors des campagnes d’achat, par le biais de formations sur les bonnes pratiques de collecte et de conservation des noix par exemple, ou des actions de sensibilisation sur l’entretien du parc d’arbres à karité.

Les effets positifs découlent également de la revalorisation des déchets de production. Dans le processus de transformation, les noix sont chauffées et pressées. D’un côté, il sort de l’huile végétale -appelée communément beurre de karité car solide à température ambiante. De l’autre côté, on obtient les résidus des noix, les tourteaux. Ces “déchets” utiles sont eux-mêmes réutilisés dans la chaudière de l’usine et distribués aux femmes comme combustible pour le traitement post-collecte. Rien ne se perd, tout se transforme! 

L’histoire de Mali Shi démontre l’émergence d’une nouvelle réalité économique en Afrique : des entrepreneurs locaux, déterminés, peuvent faire face à d’immenses obstacles pour développer des filières qui contribuent à créer des milliers d’emplois en valorisant des ressources disponibles localement. Les financements nécessaires, de l’ordre de quelques millions d’euros – à comparer au budget de certains programmes portés par les institutions internationales de développement – prouvent que des petits montants bien investis peuvent générer un impact considérable sur le long terme. 

Ce ne sont pas les opportunités qui manquent en Afrique, y compris dans des pays enclavés et réputés instables comme le Mali. Comme partout ailleurs, il s’agit pour réussir d’être pragmatique dans l’approche et la vision des projets entrepris et de s’entourer des bonnes compétences. Espérons que Mali Shi inspire d’autres réussites entrepreneuriales ailleurs sur le continent !

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Les déchets plastiques en Afrique : de la fatalité aux opportunités ?

Si la bataille réglementaire contre les sachets plastiques a connu des succès remarqués en Afrique, où 34 pays sur 54 en ont banni l’usage, ces victoires ne doivent pas être…

Si la bataille réglementaire contre les sachets plastiques a connu des succès remarqués en Afrique, où 34 pays sur 54 en ont banni l’usage, ces victoires ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt. Les sachets plastiques sont certes la forme la plus visible de la pollution plastique, mais ils sont loin d’en être la seule source. Il s’agit aussi d’être réaliste : l’usage du plastique n’est pas près de diminuer, pas plus que sa production. Celle-ci pourrait en effet tripler d’ici  2050, à l’heure où leurs méfaits pour la santé et l’environnement font l’objet d’une vigilance accrue.

Le sujet est particulièrement sensible en Afrique, qui est en train de devenir l’un des exutoires des déchets plastiques du reste du monde, sans compter les déchets produits localement. La difficulté à recycler et à valoriser les déchets plastiques qui s’accumulent dans les décharges à ciel ouvert devrait être l’une des priorités des décideurs politiques et des industriels. 

Alors que l’ONU pose les fondations d’un traité visant à résoudre la question des déchets plastiques, il est urgent pour l’Afrique de trouver des solutions qui n’aient pas pour seul objectif la disparition totale des emballages plastiques mais qui visent à développer des modes alternatifs de production de plastiques 100% biodégradables ou recyclables, ainsi que des services de collecte et de revalorisation

Rappelons que le plastique n’a pas que des effets néfastes. Parmi les avantages les plus évidents, les emballages plastiques ont permis d’accroître considérablement la durée de vie des aliments frais. Sans emballages adéquats, on ne pourrait transporter ni viande, ni liquide, ni un grand nombre de préparations dans les villes et les zones les plus reculées du continent. Le plastique est plus léger et plus résistant que le verre, et plus malléable que le métal. C’est un excellent isolant, imperméable, modelable en une infinité de formats, d’épaisseurs et de formes. Si cette matière est aujourd’hui aussi omniprésente, c’est parce qu’elle a démontré des bénéfices que nulle autre matière ne possédait. 

La question n’est donc pas tant la manière de se débarrasser des plastiques que d’en raisonner l’usage, d’en transformer la production et la gestion afin de les rendre recyclables et, autant que possible, de trouver de nouvelles sources (autres que le pétrole…) pour les produire.

Déjà, de nombreuses initiatives émergent  sur le continent africain, pour valoriser les déchets plastiques qui peuvent l’être : réutilisation des déchets pour en faire des briques de construction ou des poubelles publiques, ou encore collecte individuelle des déchets recyclables pour les revendre aux usines spécialisées dans leur transformation. 

Mais ces initiatives ne pourront pas déclencher un mouvement de masse à l’échelle des économies nationales africaines si de véritables circuits de production de plastiques 100% recyclables, de collecte et de recyclage, ne sont pas mis en place. Ces circuits existant pour le verre, rien n’interdit d’imaginer que de la chaîne de valeur du plastique puisse s’en inspirer. 

Tout comme pour les métaux et le verre, le recyclage des déchets plastiques a une logique économique, et des solutions techniques existent déjà (plastiques PET) ou sont en cours de développement (bioplastiques à base d’algues, de champignons, ou synthétisés par des bactéries). Le succès de chacune de ces méthodes dépendra notamment de leur capacité à s’intégrer dans un cycle plus large de réutilisation : soit pour produire du biogaz, soit comme intrant agricole, soit comme produit recyclable sous la même forme. 

Le tournant peut être pris en rassemblant chercheurs, ingénieurs, décideurs publics, industriels, usagers et tous ceux qui, aujourd’hui de manière informelle, demain peut-être en tant que salariés, vivent de la valorisation des déchets plastiques et ont de ce fait développé une expertise dans leur tri, leur collecte, leur commercialisation et leur revalorisation. 

Le fonds Moringa s’engage dans cette voie avec les sociétés de son portefeuille, à travers le projet Moringa/ATAF et la société de conseil The Right Packaging*. Les pistes de réflexion actuellement développées ciblent la maîtrise de la collecte des bouteilles d’eau et de leur recyclage, et l’emploi de procédés de décontamination haute pression (HPP) en tank plutôt que dans l’emballage pour jus de fruits – ce qui permet d’utiliser d’autres matières que le plastique (carton, verre, canette). Pour les fruits secs, il s’agit de privilégier la vente en vrac ainsi que l’utilisation des emballages flexibles mono-matériaux permettant leur recyclage. Ces pistes sont explorées notamment dans les sociétés du portefeuille de Moringa au Mali et au Bénin. 

Le marché du traitement des déchets plastiques recèle d’immenses profits potentiels, et ce même hors des frontières du continent. La production de plastique en Europe commence déjà à manquer de matériaux à recycler et une industrie de retraitement des déchets en Afrique pourrait trouver là un marché secondaire permettant de financer son développement. À terme, le plastique pourrait devenir une matière première convoitée… 

Faire coïncider les intérêts environnementaux, économiques, commerciaux et l’innovation scientifique, telle pourrait finalement être la conséquence heureuse et inattendue des solutions apportées à l’enjeu des déchets plastiques en Afrique.

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Financement des agricultures africaines : comment sortir de l’impasse ?

Le constat est largement partagé : l’agriculture est au centre des enjeux de croissance économique, de stabilité politique et de lutte contre les changements climatiques en Afrique. Pourtant, aujourd’hui encore, les…

Le constat est largement partagé : l’agriculture est au centre des enjeux de croissance économique, de stabilité politique et de lutte contre les changements climatiques en Afrique. Pourtant, aujourd’hui encore, les montants mobilisés par les gouvernements africains pour l’alimentation et l’agriculture sont très en deçà des objectifs fixés. Alors que la FAO estime que 10% des budgets nationaux africains devraient être dédiés à ces secteurs afin de permettre un développement économique et social, en réalité ces budgets sont généralement trop faibles, mal dépensés et peu efficaces (FAO, 2021). Qu’un secteur aussi essentiel reste victime d’une situation de sous-investissement chronique démontre l’extrême complexité du défi posé à l’Afrique. L’urgence d’améliorer le financement des agricultures africaines est largement admise, mais la mise en œuvre s’avère obstinément défaillante.

Les budgets mobilisés par les gouvernements africains pour l’alimentation et l’agriculture sont généralement trop faibles, mal dépensés et peu efficaces

Ainsi, aujourd’hui encore, le secteur reste marqué par les faillites des différentes banques nationales créées dans nombre de pays du continent pour financer le développement du secteur agricole. Les acteurs bancaires traditionnels sont quant à eux souvent peu enclins à orienter leurs produits de financement vers des acteurs agricoles perçus comme trop risqués, trop informels et trop atomisés.

Pourtant, les banques ont un rôle essentiel à jouer dans le futur de l’agriculture africaine. Comment pouvons-nous apprendre des erreurs du passé et proposer des solutions adaptées au financement des agricultures africaines ?

 

S’inscrire dans une démarche d’apprentissage et d’échanges

L’analyse des chaines de valeur agricoles permet de s’approprier les filières dans leur exhaustivité. Chaque flux peut être analysé aux différents maillons de la filière : production, collecte, transformation, transport, distribution, fourniture d’équipements, etc. On sort ainsi de l’idée fausse selon laquelle financer le secteur agricole signifie financer uniquement les producteurs.

Cette approche d’analyse de la chaine de valeur s’articule avec une nécessaire démarche de terrain pour rencontrer les entrepreneurs agricoles et déconstruire les idées préconçues. À titre d’exemple, l’une des hypothèses couramment admises était que le principal critère de choix d’un crédit était son coût (sensibilité-prix des entrepreneurs agricoles). À l’occasion d’entretiens avec des entrepreneurs du secteur agricole au Sénégal, il s’est avéré que le principal critère pour eux était la réactivité de l’institution bancaire, plutôt que le taux d’intérêt, essentiellement en raison des contraintes de saisonnalité.

 

L’importance de la proximité et des ressources humaines dédiées

Le premier levier de gestion du risque réside dans la formation des ressources internes (chargés d’affaires et responsables de crédit) : il s’agit de remettre le responsable de crédit au cœur du processus d’identification des risques relatifs à une filière ou à un acteur.

La présence commerciale en prise directe avec l’écosystème d’une filière permet une meilleure évaluation des risques

À cette formation des équipes doit s’ajouter une plus grande proximité géographique avec les bassins de productions de la filière agricole. La présence commerciale en prise directe avec l’écosystème d’une filière permet une meilleure évaluation des risques. Par exemple, Cofina a décidé d’ouvrir une agence dans la région des Niayes au Sénégal afin d’être proche du bassin de cultures maraichères : cela permet à la fois une meilleure approche marketing et une meilleure connaissance des risques liés aux cultures de la zone.

 

Mieux cibler les acteurs pour « dé-risquer » le financement

Afin de gérer les risques, l’institution de financement peut également privilégier les acteurs ayant la meilleure qualité de signature dans la chaine de valeur. Il s’agit généralement d’acteurs de taille plus importante et plus formels : agrégateurs, négociants, transformateurs, etc. Dans un deuxième temps, la banque peut « descendre ou remonter » la chaine de valeur vers des acteurs perçus comme plus risqués.

La banque peut aussi identifier des instruments de financement où la qualité de signature d’un acteur dominant sécurise la banque afin de financer l’aval ou l’amont de la filière : par exemple via une avance sur facture. Dans cette « démarche de points d’entrée », la gestion du risque s’inscrit dans différentes phases temporelles : les partenaires commerciaux de mon client d’aujourd’hui sont mes clients de demain.

Enfin, la mobilisation des banques africaines vers le financement de l’agriculture locale sera permise à la condition qu’elles aient accès aux liquidités de long terme. Dans ce contexte, les bailleurs de fonds internationaux ou les fonds à impact ont un rôle primordial à jouer en donnant aux banques locales les moyens de financer efficacement les filières agricoles, via des « fonds fléchés » pour l’agriculture. Outre ce rôle d’amorceur, les bailleurs peuvent en partie répondre aux risques posés par les faibles garanties et actifs de mauvaise qualité caractérisant certains acteurs des filières agricoles.

Ceci est possible en mobilisant des fonds de partage du risque, des financements concessionnels ou des fonds de garantie. Via des subventions ciblées, les agences de développement peuvent également faciliter les démarches d’analyse des chaines de valeur, d’identification de cibles potentielles et de création de pipelines attractifs.

 

Apprentissage, proximité et gestion du risque

Les centaines de milliards manquants pour le financement des agricultures africaines peuvent être perçus de deux manières : soit ils sont le symptôme d’un secteur qui ne peut pas être financé par les banques, délaissant cette fonction aux programmes publics, aux bailleurs internationaux ou à quelques rares institutions de microfinance… soit ils sont le signe qu’il existe un immense champ d’opportunités inexploitées.

En tant que soutiens engagés pour la croissance des PME africaines, Cofina et classM souscrivent sans réserve à la deuxième option. Notre conviction est qu’une démarche basée sur l’apprentissage des erreurs passées, la proximité avec les acteurs et une meilleure gestion du risque permettra de réaliser le potentiel des agricultures africaines.

 

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Innover dans l’investissement pour renforcer l’autonomisation des Femmes

Cet article a été co-écrit par Ksapa et Investisseurs & Partenaires, et est également publié sur leur site web.   La question du genre est au cœur du débat international….

Cet article a été co-écrit par Ksapa et Investisseurs & Partenaires, et est également publié sur leur site web.

 

La question du genre est au cœur du débat international. Lélimination de la discrimination des femmes et des filles, l’autonomisation des femmes et la parité entre femmes et hommes sont considérés comme des facteurs clefs du développement, du respect des droits humains, de la paix et de la sécurité mondiale. Les Objectifs de Développement Durable ont d’ailleurs réaffirmé ce rôle clef de l’autonomisation des femmes dans le jeu démocratique, pour prendre les décisions qui s’imposent dans sur tous les aspects du développement durable.  

Pour étudier les implications de l’autonomisation des femmes pour le secteur privé, Ksapa s’est rapproché d’Investisseurs & Partenaires, spécialiste de l’investissement à impact sur le continent africain. Ensemble, nous examinons les données du défi de l’autonomisation de la femme, particulièrement prégnant en milieu rural à travers le continent africain. Comment, dans les conditions actuelles, adapter les plans d’action sur le genre des investisseurs et des entreprises pour mieux répondre au défi ? Forts des différentes initiatives que nous menons, Ksapa et I&P tirent des recommandations pratiques pour la mobilisation du capital et les technologies disponibles en faveur de l’autonomisation des femmes.

 

1. Grands enjeux de l’autonomisation des femmes

L’autonomisation des femmes implique, en essence, une distribution équitable des ressources entre les hommes et les femmes, les filles et les garçons. Voilà pour le principe. En pratique, l’autonomisation des femmes bouscule des comportements sociaux très ancrés, qui se traduisent dans des décisions sociales, économiques et culturelles tout aussi structurelles.

  • Des disparités structurelles entre hommes et femmes

De fait, hommes et femmes, garçons et filles ne sont pas égaux face à la pauvreté et dans l’accès aux opportunités d’avancement – et ce, d’autant moins dans le contexte des crises climatiques, sanitaires et socio-économiques actuelles. Les femmes ne représentent qu’un tiers ou moins de la richesse en capital humain dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire inférieur. En Asie du Sud, les pertes liées aux inégalités de genre sont estimées à 9 100 milliards de dollars, contre 6 700 milliards de dollars en Amérique latine et dans les Caraïbes et 3 100 milliards de dollars au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. En Afrique subsaharienne, elles atteignent 2 500 milliards de dollars.

À ce titre, l’OCDE publie un indice des institutions sociales et égalité entre hommes et femmes pour mesurer, à l’échelle internationale, les discriminations à l’encontre des femmes dans les institutions sociales. Pour exemple, en 2019, cet indice était de 37.0 au Sénégal, 42,8 en Côte d’Ivoire et 34,5 au Ghana.

  • Impacts socio-économiques de l’autonomisation de la femme

Pour autant, et bien qu’elles fassent l’objet de préjugés, les femmes contrôlent actuellement 32% de la richesse, ajoutant ainsi 5 000 milliards de dollars à la richesse mondiale chaque année. Le tout à un rythme beaucoup plus rapide que par le passé. En outre, pour chaque dollar d’investissement levé, les jeunes entreprises appartenant à des femmes génèrent 0,78 dollar de revenus, contre 0,31 dollar pour les entreprises dirigées par des hommes. Ainsi, la parité entre hommes et femmes sur le marché du travail pourrait générer une hausse de 26% du PIB mondial annuel d’ici à 2025.

  • Zoom sur la femme dans le secteur agricole africain

L’agriculture en particulier représente près de 25 % du PIB de l’Afrique et les femmes constituent près de la moitié de la main d’œuvre de ce secteur en Afrique subsaharienne. Sur l’ensemble du continent, l’agriculture s’avère même le tout premier employeur des femmes, concentrant 62 % des femmes actives. Dans certains pays, comme le Rwanda, le Malawi et le Burkina Faso, elles sont même plus de 90 % à y travailler.

Le travail des femmes est, comme ailleurs, sujet à des disparités critiques – notamment en termes de répartition des tâches et de prépondérance du travail informel. Dans le milieu agricole africain, les femmes tendent à opter pour des cultures et techniques spécifiques et leur travail n’est pas rémunéré de la même façon.

Lorsqu’il fait l’objet d’un contrat, il ne porte pas systématiquement leur nom – et souvent celui de leur mari. De même, les agricultrices africaines ont tendance à investir les marchés locaux et le commerce de détail, là où les hommes misent davantage sur le commerce de gros, avec une portée régionale.

 

2. Intégrer une solide perspective du genre dans les stratégies d’investissements à impact

La lutte contre la pauvreté et la sécurité alimentaire dépendent directement du développement de solutions systématiques pour l’autonomisation des femmes. Les mesures nécessaires pour développer des moyens de subsistance stables grâce au secteur agricole africain incluent donc des dispositifs innovants d’accès à la terre, au capital et moyens de production – en particulier pour les femmes.

C’est précisément pourquoi la Banque mondiale a élaboré une stratégie de genre à destination des développeurs de projets internationaux. Le document liste 4 leviers clefs pour diminuer les écarts entre hommes et aux femmes :

  • Sensibilisation : Améliorer les écarts entre hommes et femmes en réduisant notamment les différentiels d’accès à la santé, l’éducation et la protection sociale (par exemple, les transitions école/travail, les stéréotypes sexistes sur le lieu de travail, les droits en matière de santé sexuelle et génésique…).
  • Opportunité : Supprimer les barrières à un emploi plus important et de meilleure qualité, en stimulant la participation des femmes, les opportunités pour elles de générer leurs propres revenus et d’accéder aux actifs productifs (en gardant à l’esprit les considérations clés de la charge des soins, de l’accès à la mobilité et à l’emploi formel…).
  • Capacité d’action : Renforcer l’expression des femmes et les mettre en capacité d’agir, en incitant les hommes et garçons à partager avec elles les décisions sur la prestation de services, la réduction des violences sexistes et la gestion de situations conflictuelles.
  • Propriété : Supprimer les obstacles à la propriété et au contrôle des biens par les femmes, en améliorant l’accès des femmes à la terre, au logement et à la technologie.

En s’appuyant sur cette stratégie, les investisseurs, et en particulier les équipes de développement, sont amenés à examiner les modalités de dialogue avec les parties prenantes potentiellement impactées, afin d’identifier et évaluer les écarts concrets entre les genres. Autant d’efforts qui débouchent sur le développement d’un plan d’action en matière de genre.

 

3. Exemples pratiques de la mobilisation du capital pour l’autonomisation des femmes

  • Zoom sur 3 entreprises du secteur agricole soutenues par I&P 

I&P est engagé depuis 20 ans pour financer et accompagner l’émergence de champions de l’entrepreneuriat africain. En tant qu’investisseur d’impact, I&P vise un retour social et/ou environnemental positif ainsi qu’une performance financière significative dont l’impact est mesurable par un processus continu d’évaluation.

Cette approche porte à la fois dans le choix d’investissements ciblés et dans l’accompagnement des entreprises sélectionnées. L’accompagnement se caractérise également par la mesure de l’impact social et/ou environnemental de l’entreprise, sur la base d’objectifs prioritaires et de modalités de suivi des progrès sur les impacts positifs escomptés. Dans le cadre de sa stratégie genre1, I&P cherche activement à développer un pipeline de PME, soit gérées par des femmes, soit à fort impact pour les femmes.

I&P inclut donc systématiquement des plans d’action spécifiques au genre dans le plan d’action ESG des entreprises en portefeuille (augmentation du nombre d’emplois féminins, accès à des postes de direction, formations spécifiques…). À date, 33% des entreprises accompagnées par la famille I&P sont dirigées par des femmes. De même, 79% du portefeuille d’I&P répond à au moins un critère du 2X Challenge, une initiative des banques de développement pour définir ce qui serait considéré comme un investissement favorable aux femmes.

Au sein du portefeuille d’I&P, plusieurs entreprises illustrent comment une perspective de genre peut être développée dans le secteur agriculture, comme :

    • Soafiary (Madagascar) :Fondée en 2006 par la promotrice malgache Malala Rabenoro, Soafiary est spécialisée dans la collecte, la transformation et la vente de céréales (maïs, riz) et de légumineuses (haricots, pois du cap, lentilles, soja) sur le marché local et international.
    • Citrine (Côte d’Ivoire) :Citrine Corporation est une entreprise spécialisée dans la transformation du manioc en attiéké frais (semoule de manioc) et en placali (pâte de manioc) au sud de la Côte d’Ivoire, plus précisément à Grand-Bassam.
    • Rose Eclat (Burkina Faso) :Entreprise familiale créée en 1999 par Rosemonde Touré, Rose Eclat est une société de transformation de fruits et légumes. Aujourd’hui, l’entreprise met sur le marché national et international des fruits et légumes transformés et/ou séchés certifiée biologique et conforme à la méthode de gestion de la sécurité sanitaire des aliments (HACCP). L’entreprise produit principalement de la mangue mais aussi des bananes, des gombos, des fraises ou encore des oignons.

Emblématiques de l’action d’I&P en matière d’autonomisation des femmes dans le secteur agriculture, ces trois entreprises se sont engagées à appliquer une politique favorable à l’égalité des genres et à l’autonomisation des femmes. L’une d’entre elles, Soafiary, a retranscrit cette politique en une feuille de route résumant tous ses engagements en matière d’égalité et d’autonomisation des femmes. Cette feuille de route écrite sert à tracer les grandes lignes de la politique genre de l’entreprise, et est surtout un outil concret de suivi et d’évaluation que ce soit en interne ou en externe des avancés et des efforts qui ont été fait par l’entreprise en matière d’égalité homme-femme.

Les trois entreprises priorisent le recrutement des femmes aux emplois saisonniers et n’appliquent aucune forme de discrimination sexuelle pour les recrutements aux emplois fixes. Les femmes y sont également impliquées dans le processus de prise de décision et occupent divers postes à responsabilité. Ainsi, les hommes et les femmes ont les mêmes égalités de chance d’avancement professionnel – soit via l’accès à des emplois fixes ou à emplois saisonniers, et ce avec des rémunérations comparables. Les femmes bénéficient en outre de formations sur leurs lieux de travail.

Rose Eclat en particulier donne l’opportunité aux femmes de se former en dehors de l’entreprise en vue d’un avancement professionnel ou qui leurs permettront plus tard de se mettre à leurs comptes.

Les trois entreprises veillent de plus au respect des droits à l’intégrité physique et morale des femmes sur et en dehors de leurs lieux de travail et les donnent accès à des soins de santé et à la protection sociale. Soafiary a également mis en place un système d’inclusion financière et de bancarisation des femmes. L’accès à des produits et services financiers permet aux femmes d’anticiper le financement d’objectifs à long et moyen terme ou de faire face à des imprévus. Par ailleurs, l’épargne encourage le crédit, et inversement.

  • Zoom sur l’approche SUTTI de Ksapa

Misant particulièrement sur ce levier de la formation, Ksapa a lancé l’initiative Scale-up Training, Traceability, Impact initiative (SUTTI) pour le développement de chaînes d’approvisionnements agricoles responsables. Nous proposons pour cela aux petits exploitants agricoles l’accès à de la formation et de l’éducation technique et opérationnelle. Ainsi nous visons l’optimisation des cultures et la production économique agricole, l’amélioration de la qualité des moyens de subsistance des agriculteurs en augmentant les revenus, en diversifiant les activités et en réduisant la pauvreté et enfin la parité entre hommes et femmes. Et ce, notamment pour retenir les jeunes fermiers dans les zones rurales.

Grâce au développement de notre propre application numérique, nous combinons l’analyse et l’évaluation, la structuration de la coalition et le calibrage du pilote et la mise en œuvre du programme et le suivi de l’impact. C’est ainsi que Ksapa mesure l’impact de l’initiative SUTTI et particulièrement les impacts spécifiques liés aux femmes, principalement leur inclusion dans le programme. Via la formation, nous soutenons l’autonomisation des femmes, en ouvrant la division conventionnelle du travail et le potentiel des femmes à vendre et gérer le produit de leur travail et à exploiter des activités de revenus diversifiées.

Parce que les femmes subissent de plein fouet le manque d’inclusion financière, d’alphabétisation et de compétence numérique, notre solution vise une accessibilité optimale de ces dernières. Nos programmes étant centrés la diversification des revenus des petits producteurs agricoles, ils développent par là même un levier additionnel d’autonomisation des femmes en milieu agricole. En somme, cette approche vise à débloquer 4 défis clefs de la manière suivante :

DEFIS CLEFS  SOLUTIONS PERTINENTES
Faible productivité due au manque d’accès à l’information et aux services, au changement climatique, à la variabilité des conditions météorologiques et aux épidémies de parasites et de maladies.  Sensibilisation aux bonnes pratiques agricoles (BPA) : dispenser des sessions en face à face et numériques pour encourager la génération de revenus via l’efficacité de l’eau, le crédit carbone et la diversification des cultures. Via une application numérique, il est possible de partager des vidéos et des tutoriels qui soutiennent des tests pratiques et la mise en œuvre des BPA à l’échelle de toute l’exploitation. Développer les outils d’aide à la décision : les applications numériques peuvent inclure une fonction de chat communautaire permettant aux petits exploitants agricoles de partager leurs questions et de décider de la meilleure façon de mettre en œuvre les BPA. Une fonction de marketplace offre aux petits exploitants agricoles l’opportunité de partager des informations sur les prix et volumes pour pouvoir décider où et quand vendre. Lever les barrières de langue et de culture numérique : Adapter les solutions aux besoins des petits exploitants agricoles implique notamment de traduire les contenus dans les langues locales – en intégrant une fonction de synthèse vocale à destination des fermiers moins lettrés.
 Manque d’accès à des produits financiers et d’assurance adaptés Développer des solutions financières pour les petits exploitants, payées par exemple avec des jetons émis via un système de compensation carbone.
L’accès des femmes aux services numériques  Organisation des groupes de formation féminins (par exemple, recruter une cohorte exclusivement féminine sur trois) pour identifier et répondre aux besoins spécifiques des agricultrices. Adapter le contenu en conséquence (par exemple, en incluant une perspective de genre, notamment dans les contenus de formation sur la santé-sécurité sur la ferme).
Manque d’accessibilité et de capacité à sélectionner les marchés et modalités de vente  Structurer l’approvisionnement des petits producteurs agricoles en intrants, payés via un système de compensation carbone et les revenus d’un outil de gamification les incitant à répondre régulièrement à des questionnaires de suivi d’impact. Favoriser l’accès au marché en soutenant la diversification des cultures tout au long de l’année en dehors du cycle de production de la culture prédominante des fermiers concernés. Conforter les outils d’aide à la décision avec un module qui permettre aux petits exploitants agricoles d’identifier de nouveaux modes de commercialisation, suivre leurs transactions et identifier les meilleures options pour acheter/vendre leurs cultures

 

Conclusion 

A la tête de leurs programmes à impact respectifs, I&P et Ksapa tirent ensemble 5 grands enseignements pour l’intégration d’une solide perspective de genre :

  • Prioriser les questions d’autonomisation des femmes dans le développement de projets de développement agricole
  • Formaliser les contributions directes et indirectes du secteur agricole aux dynamiques de genre
  • Clarifier les rôles et responsabilités pour le développement d’une robuste perspective du genre
  • Attribuer des ressources spécifiques à l’autonomisation des agricultrices
  • Développer des mécanismes de dialogue et de remontée des griefs propres aux agricultrices
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