Penser et agir pour l’entrepreneuriat en Afrique

Entrepreneuriat féminin

Résilience et adaptation en période d’insécurité : le combat des entrepreneures nigériennes (1/2)

La femme nigérienne a de tous temps brillé par sa résilience, par instinct de survie dans un environnement aride et hostile.  Si les écrits, dans une histoire africaine traditionnellement orale,…

La femme nigérienne a de tous temps brillé par sa résilience, par instinct de survie dans un environnement aride et hostile. 

Si les écrits, dans une histoire africaine traditionnellement orale, sont relativement récents, ils commencent dès la fin du 19e siècle à nous vanter le courage d’une reine guerrière, figure de la résistance face aux colons – Sarraounia Mangou. De 1960 à 1974, le Niger refait parler de lui à travers sa première « Première Dame », Mme Aïssa DIORI, qui charme, certes, par sa grande beauté, mais surtout par son charisme inégalé et son intelligence rare. Ainsi, « son prestige rayonne à travers le monde. Côtoyant les grands de ce monde (Elisabeth II, Haïlé Sélassié, Nasser, De Gaulle, Johnson…), Madame Diori impose respect et admiration. Aux côtés de son époux, elle entamera, sans bousculer, l’émancipation féminine par le travail et la rigueur, dans cette région afro-musulmane. » Elle a tant et si bien incarné la résilience. Tant dérangée, qu’elle a été personnellement visée et mortellement touchée lors du coup d’Etat de 1974.

En 1992, le Niger instaure, en plus du 8 mars qui est mondialement célébré, une journée de la femme nigérienne, afin d’honorer cette résilience. En effet, suite à la marche historique de 1991 des femmes pour réclamer une plus grande représentativité au sein de la commission préparatoire de la Conférence Nationale Souveraine, le 13 Mai symbolise désormais la journée de la femme nigérienne instituée par décret présidentiel.

 

Ceci étant dit, rappelons quelques aspects de cet environnement hostile. Bien que représentant 50,60% de la population, les femmes affichent le taux d’analphabétisme le plus élevé, atteignant 78%  (contre 60% pour les hommes) et sont également les plus pauvres. En effet, quatre pauvres sur cinq sont des femmes, coulant sous le poids des barrières socioculturelles et économiques telles que la dépendance matérielle, caractérisée par un faible pouvoir de décision, une pénibilité des travaux et un difficile accès aux services de base. Une dépendance financière se traduisant par une monétisation faible, un accès  laborieux aux connaissances, aux emplois et aux ressources productrices.

Le Niger détient deux tristes records, impactant tous les deux les femmes : le plus fort taux de fécondité au monde (6,2 enfants par femme en 2021 vs 7,6 en 2012) et le plus fort taux de mariages précoces : 77% de nos filles sont mariées avant 18 ans et 28% avant 15 ans. Et il ne s’agit là que des chiffres officiels… beaucoup pensent que la réalité est encore plus alarmante.

Dans ce contexte, les femmes ont très vite compris que la solidarité – qui rejoint le concept en vogue de sororité – était leur seule option et les entrepreneures ne font pas exception à cette tendance.

 

Culturellement, elles sont cantonnées à un type de métiers “acceptables” pour des femmes : la couture, l’esthétique, la transformation agro-alimentaire ou la commercialisation de fruits et légumes et la cuisine qui sont également des secteurs à faible marge, à faible revenu. Et avec de faibles barrières à l’entrée, la concurrence y est donc importante, et les activités y sont souvent informelles.

Dans les villes, elles dirigent ou s’investissent dans des TPE et des PME. Elles cumulent les initiatives et les emplois. Lorsqu’elles ont eu accès à une formation, elles conservent leur emploi salarié et développent leur TPE en parallèle. L’insécurité ne les affecte pas beaucoup, elles aménagent simplement leurs horaires et prennent des précautions pour éviter les zones dangereuses à la périphérie. 

Dans les zones rurales, elles exercent des activités génératrices de revenus. Dans les villages, les femmes s’occupent traditionnellement des cultures maraîchères, de l’élevage de volaille et de petits ruminants. Ces revenus leur permettent de contribuer à prendre en charge la famille. Avec l’insécurité, les pillages et les agressions ont privé nombre d’entre elles de revenus, entraînant une hausse des prix sur les marchés et une paupérisation de communes entières. La migration forcée, l’exode rural et les pertes des pères de famille et des fils au front, ont augmenté la vulnérabilité des femmes rurales et les violences basées sur le genre. 

Toutefois, depuis 1992, elles s’organisent en Union. Il s’agit d’une association ou structure de femmes qui ont décidé volontairement de se regrouper pour défendre des intérêts communs, mais surtout construire leur autonomisation financière à travers des tontines – le plus souvent 100% féminines. L’insécurité a renforcé davantage cette solidarité. 

Le système financier s’est également adapté et propose de plus en plus des produits à ces groupements, qui accèdent ainsi à l’épargne puis au crédit, et peuvent s’affranchir de la garantie ou de la caution qui leur était donnée par un homme. La dématérialisation des tontines traditionnelles permet également de lutter contre les pillages et de sécuriser les avoirs de ces unions de femmes. 

Rurales ou urbaines, les entrepreneures nigériennes s’organisent, construisent et poursuivent leur résilience. Des groupes dédiés aux entrepreneures se créent sur les réseaux sociaux, des associations professionnelles également, ainsi que des incubateurs exclusivement dédiés aux femmes. Une institution de microfinance, la MECREF, a fait le pari depuis plus de 20 ans de s’adresser à une clientèle constituée à 100% de femmes. En effet, au Niger comme dans le reste du monde, les études montrent que les entrepreneures sont de meilleures payeuses que les hommes. 

“Rurales ou urbaines, les entrepreneures nigériennes s’organisent, construisent et poursuivent leur résilience.”

 

Il n’en demeure pas moins que la situation reste critique dans de nombreuses régions. Depuis le début de l’année 2023, selon les chiffres officiels, environ 670.000 déplacés forcés ont été recensés au Niger, dont 52% sont des femmes.

Les femmes nigériennes auront un rôle de plus en plus important à jouer dans la reconstruction de la paix au Niger. Souvent, les familles de militaires se retrouvent seules avec des femmes à leurs têtes. Et comme ce que l’on a pu observer lors des grandes guerres mondiales en Europe, les femmes sont tout à fait capables de maintenant prendre la tête de ces familles là et de pouvoir avoir une activité économique génératrice de revenus qui va prendre en charge la famille. 

Leur résilience est encore mise à l’épreuve suite au Coup d’État du 26 juillet 2023. Les sanctions pèsent sur les ménages et sur les femmes en particulier, notamment la hausse des prix des denrées alimentaires. Les Nigériennes appellent davantage à la paix et au recours à une sortie de crise diplomatique mais se passionnent également pour cette page historique que le pays tout entier écrit désormais.

“Leur résilience est encore mise à l’épreuve suite au Coup d’État du 26 juillet 2023”

 

Ainsi, plus que jamais, l’autonomisation des femmes participe au développement économique et doit être une priorité. Cela a un impact plus important au niveau de la santé, au niveau de l’éducation et au niveau du développement économique en général. Et le fait qu’elles s’impliquent davantage et que nous puissions les accompagner davantage aura un impact sur la sécurité de manière transversale et de manière localisée.

Aller plus loin : dans la série “Résilience et Adaptation”, découvrez l’article de Mohamed Keita,”Le renouveau du Mali passera par le secteur privé“.

 

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Innover dans l’investissement pour renforcer l’autonomisation des Femmes

Cet article a été co-écrit par Ksapa et Investisseurs & Partenaires, et est également publié sur leur site web.   La question du genre est au cœur du débat international….

Cet article a été co-écrit par Ksapa et Investisseurs & Partenaires, et est également publié sur leur site web.

 

La question du genre est au cœur du débat international. Lélimination de la discrimination des femmes et des filles, l’autonomisation des femmes et la parité entre femmes et hommes sont considérés comme des facteurs clefs du développement, du respect des droits humains, de la paix et de la sécurité mondiale. Les Objectifs de Développement Durable ont d’ailleurs réaffirmé ce rôle clef de l’autonomisation des femmes dans le jeu démocratique, pour prendre les décisions qui s’imposent dans sur tous les aspects du développement durable.  

Pour étudier les implications de l’autonomisation des femmes pour le secteur privé, Ksapa s’est rapproché d’Investisseurs & Partenaires, spécialiste de l’investissement à impact sur le continent africain. Ensemble, nous examinons les données du défi de l’autonomisation de la femme, particulièrement prégnant en milieu rural à travers le continent africain. Comment, dans les conditions actuelles, adapter les plans d’action sur le genre des investisseurs et des entreprises pour mieux répondre au défi ? Forts des différentes initiatives que nous menons, Ksapa et I&P tirent des recommandations pratiques pour la mobilisation du capital et les technologies disponibles en faveur de l’autonomisation des femmes.

 

1. Grands enjeux de l’autonomisation des femmes

L’autonomisation des femmes implique, en essence, une distribution équitable des ressources entre les hommes et les femmes, les filles et les garçons. Voilà pour le principe. En pratique, l’autonomisation des femmes bouscule des comportements sociaux très ancrés, qui se traduisent dans des décisions sociales, économiques et culturelles tout aussi structurelles.

  • Des disparités structurelles entre hommes et femmes

De fait, hommes et femmes, garçons et filles ne sont pas égaux face à la pauvreté et dans l’accès aux opportunités d’avancement – et ce, d’autant moins dans le contexte des crises climatiques, sanitaires et socio-économiques actuelles. Les femmes ne représentent qu’un tiers ou moins de la richesse en capital humain dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire inférieur. En Asie du Sud, les pertes liées aux inégalités de genre sont estimées à 9 100 milliards de dollars, contre 6 700 milliards de dollars en Amérique latine et dans les Caraïbes et 3 100 milliards de dollars au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. En Afrique subsaharienne, elles atteignent 2 500 milliards de dollars.

À ce titre, l’OCDE publie un indice des institutions sociales et égalité entre hommes et femmes pour mesurer, à l’échelle internationale, les discriminations à l’encontre des femmes dans les institutions sociales. Pour exemple, en 2019, cet indice était de 37.0 au Sénégal, 42,8 en Côte d’Ivoire et 34,5 au Ghana.

  • Impacts socio-économiques de l’autonomisation de la femme

Pour autant, et bien qu’elles fassent l’objet de préjugés, les femmes contrôlent actuellement 32% de la richesse, ajoutant ainsi 5 000 milliards de dollars à la richesse mondiale chaque année. Le tout à un rythme beaucoup plus rapide que par le passé. En outre, pour chaque dollar d’investissement levé, les jeunes entreprises appartenant à des femmes génèrent 0,78 dollar de revenus, contre 0,31 dollar pour les entreprises dirigées par des hommes. Ainsi, la parité entre hommes et femmes sur le marché du travail pourrait générer une hausse de 26% du PIB mondial annuel d’ici à 2025.

  • Zoom sur la femme dans le secteur agricole africain

L’agriculture en particulier représente près de 25 % du PIB de l’Afrique et les femmes constituent près de la moitié de la main d’œuvre de ce secteur en Afrique subsaharienne. Sur l’ensemble du continent, l’agriculture s’avère même le tout premier employeur des femmes, concentrant 62 % des femmes actives. Dans certains pays, comme le Rwanda, le Malawi et le Burkina Faso, elles sont même plus de 90 % à y travailler.

Le travail des femmes est, comme ailleurs, sujet à des disparités critiques – notamment en termes de répartition des tâches et de prépondérance du travail informel. Dans le milieu agricole africain, les femmes tendent à opter pour des cultures et techniques spécifiques et leur travail n’est pas rémunéré de la même façon.

Lorsqu’il fait l’objet d’un contrat, il ne porte pas systématiquement leur nom – et souvent celui de leur mari. De même, les agricultrices africaines ont tendance à investir les marchés locaux et le commerce de détail, là où les hommes misent davantage sur le commerce de gros, avec une portée régionale.

 

2. Intégrer une solide perspective du genre dans les stratégies d’investissements à impact

La lutte contre la pauvreté et la sécurité alimentaire dépendent directement du développement de solutions systématiques pour l’autonomisation des femmes. Les mesures nécessaires pour développer des moyens de subsistance stables grâce au secteur agricole africain incluent donc des dispositifs innovants d’accès à la terre, au capital et moyens de production – en particulier pour les femmes.

C’est précisément pourquoi la Banque mondiale a élaboré une stratégie de genre à destination des développeurs de projets internationaux. Le document liste 4 leviers clefs pour diminuer les écarts entre hommes et aux femmes :

  • Sensibilisation : Améliorer les écarts entre hommes et femmes en réduisant notamment les différentiels d’accès à la santé, l’éducation et la protection sociale (par exemple, les transitions école/travail, les stéréotypes sexistes sur le lieu de travail, les droits en matière de santé sexuelle et génésique…).
  • Opportunité : Supprimer les barrières à un emploi plus important et de meilleure qualité, en stimulant la participation des femmes, les opportunités pour elles de générer leurs propres revenus et d’accéder aux actifs productifs (en gardant à l’esprit les considérations clés de la charge des soins, de l’accès à la mobilité et à l’emploi formel…).
  • Capacité d’action : Renforcer l’expression des femmes et les mettre en capacité d’agir, en incitant les hommes et garçons à partager avec elles les décisions sur la prestation de services, la réduction des violences sexistes et la gestion de situations conflictuelles.
  • Propriété : Supprimer les obstacles à la propriété et au contrôle des biens par les femmes, en améliorant l’accès des femmes à la terre, au logement et à la technologie.

En s’appuyant sur cette stratégie, les investisseurs, et en particulier les équipes de développement, sont amenés à examiner les modalités de dialogue avec les parties prenantes potentiellement impactées, afin d’identifier et évaluer les écarts concrets entre les genres. Autant d’efforts qui débouchent sur le développement d’un plan d’action en matière de genre.

 

3. Exemples pratiques de la mobilisation du capital pour l’autonomisation des femmes

  • Zoom sur 3 entreprises du secteur agricole soutenues par I&P 

I&P est engagé depuis 20 ans pour financer et accompagner l’émergence de champions de l’entrepreneuriat africain. En tant qu’investisseur d’impact, I&P vise un retour social et/ou environnemental positif ainsi qu’une performance financière significative dont l’impact est mesurable par un processus continu d’évaluation.

Cette approche porte à la fois dans le choix d’investissements ciblés et dans l’accompagnement des entreprises sélectionnées. L’accompagnement se caractérise également par la mesure de l’impact social et/ou environnemental de l’entreprise, sur la base d’objectifs prioritaires et de modalités de suivi des progrès sur les impacts positifs escomptés. Dans le cadre de sa stratégie genre1, I&P cherche activement à développer un pipeline de PME, soit gérées par des femmes, soit à fort impact pour les femmes.

I&P inclut donc systématiquement des plans d’action spécifiques au genre dans le plan d’action ESG des entreprises en portefeuille (augmentation du nombre d’emplois féminins, accès à des postes de direction, formations spécifiques…). À date, 33% des entreprises accompagnées par la famille I&P sont dirigées par des femmes. De même, 79% du portefeuille d’I&P répond à au moins un critère du 2X Challenge, une initiative des banques de développement pour définir ce qui serait considéré comme un investissement favorable aux femmes.

Au sein du portefeuille d’I&P, plusieurs entreprises illustrent comment une perspective de genre peut être développée dans le secteur agriculture, comme :

    • Soafiary (Madagascar) :Fondée en 2006 par la promotrice malgache Malala Rabenoro, Soafiary est spécialisée dans la collecte, la transformation et la vente de céréales (maïs, riz) et de légumineuses (haricots, pois du cap, lentilles, soja) sur le marché local et international.
    • Citrine (Côte d’Ivoire) :Citrine Corporation est une entreprise spécialisée dans la transformation du manioc en attiéké frais (semoule de manioc) et en placali (pâte de manioc) au sud de la Côte d’Ivoire, plus précisément à Grand-Bassam.
    • Rose Eclat (Burkina Faso) :Entreprise familiale créée en 1999 par Rosemonde Touré, Rose Eclat est une société de transformation de fruits et légumes. Aujourd’hui, l’entreprise met sur le marché national et international des fruits et légumes transformés et/ou séchés certifiée biologique et conforme à la méthode de gestion de la sécurité sanitaire des aliments (HACCP). L’entreprise produit principalement de la mangue mais aussi des bananes, des gombos, des fraises ou encore des oignons.

Emblématiques de l’action d’I&P en matière d’autonomisation des femmes dans le secteur agriculture, ces trois entreprises se sont engagées à appliquer une politique favorable à l’égalité des genres et à l’autonomisation des femmes. L’une d’entre elles, Soafiary, a retranscrit cette politique en une feuille de route résumant tous ses engagements en matière d’égalité et d’autonomisation des femmes. Cette feuille de route écrite sert à tracer les grandes lignes de la politique genre de l’entreprise, et est surtout un outil concret de suivi et d’évaluation que ce soit en interne ou en externe des avancés et des efforts qui ont été fait par l’entreprise en matière d’égalité homme-femme.

Les trois entreprises priorisent le recrutement des femmes aux emplois saisonniers et n’appliquent aucune forme de discrimination sexuelle pour les recrutements aux emplois fixes. Les femmes y sont également impliquées dans le processus de prise de décision et occupent divers postes à responsabilité. Ainsi, les hommes et les femmes ont les mêmes égalités de chance d’avancement professionnel – soit via l’accès à des emplois fixes ou à emplois saisonniers, et ce avec des rémunérations comparables. Les femmes bénéficient en outre de formations sur leurs lieux de travail.

Rose Eclat en particulier donne l’opportunité aux femmes de se former en dehors de l’entreprise en vue d’un avancement professionnel ou qui leurs permettront plus tard de se mettre à leurs comptes.

Les trois entreprises veillent de plus au respect des droits à l’intégrité physique et morale des femmes sur et en dehors de leurs lieux de travail et les donnent accès à des soins de santé et à la protection sociale. Soafiary a également mis en place un système d’inclusion financière et de bancarisation des femmes. L’accès à des produits et services financiers permet aux femmes d’anticiper le financement d’objectifs à long et moyen terme ou de faire face à des imprévus. Par ailleurs, l’épargne encourage le crédit, et inversement.

  • Zoom sur l’approche SUTTI de Ksapa

Misant particulièrement sur ce levier de la formation, Ksapa a lancé l’initiative Scale-up Training, Traceability, Impact initiative (SUTTI) pour le développement de chaînes d’approvisionnements agricoles responsables. Nous proposons pour cela aux petits exploitants agricoles l’accès à de la formation et de l’éducation technique et opérationnelle. Ainsi nous visons l’optimisation des cultures et la production économique agricole, l’amélioration de la qualité des moyens de subsistance des agriculteurs en augmentant les revenus, en diversifiant les activités et en réduisant la pauvreté et enfin la parité entre hommes et femmes. Et ce, notamment pour retenir les jeunes fermiers dans les zones rurales.

Grâce au développement de notre propre application numérique, nous combinons l’analyse et l’évaluation, la structuration de la coalition et le calibrage du pilote et la mise en œuvre du programme et le suivi de l’impact. C’est ainsi que Ksapa mesure l’impact de l’initiative SUTTI et particulièrement les impacts spécifiques liés aux femmes, principalement leur inclusion dans le programme. Via la formation, nous soutenons l’autonomisation des femmes, en ouvrant la division conventionnelle du travail et le potentiel des femmes à vendre et gérer le produit de leur travail et à exploiter des activités de revenus diversifiées.

Parce que les femmes subissent de plein fouet le manque d’inclusion financière, d’alphabétisation et de compétence numérique, notre solution vise une accessibilité optimale de ces dernières. Nos programmes étant centrés la diversification des revenus des petits producteurs agricoles, ils développent par là même un levier additionnel d’autonomisation des femmes en milieu agricole. En somme, cette approche vise à débloquer 4 défis clefs de la manière suivante :

DEFIS CLEFS  SOLUTIONS PERTINENTES
Faible productivité due au manque d’accès à l’information et aux services, au changement climatique, à la variabilité des conditions météorologiques et aux épidémies de parasites et de maladies.  Sensibilisation aux bonnes pratiques agricoles (BPA) : dispenser des sessions en face à face et numériques pour encourager la génération de revenus via l’efficacité de l’eau, le crédit carbone et la diversification des cultures. Via une application numérique, il est possible de partager des vidéos et des tutoriels qui soutiennent des tests pratiques et la mise en œuvre des BPA à l’échelle de toute l’exploitation. Développer les outils d’aide à la décision : les applications numériques peuvent inclure une fonction de chat communautaire permettant aux petits exploitants agricoles de partager leurs questions et de décider de la meilleure façon de mettre en œuvre les BPA. Une fonction de marketplace offre aux petits exploitants agricoles l’opportunité de partager des informations sur les prix et volumes pour pouvoir décider où et quand vendre. Lever les barrières de langue et de culture numérique : Adapter les solutions aux besoins des petits exploitants agricoles implique notamment de traduire les contenus dans les langues locales – en intégrant une fonction de synthèse vocale à destination des fermiers moins lettrés.
 Manque d’accès à des produits financiers et d’assurance adaptés Développer des solutions financières pour les petits exploitants, payées par exemple avec des jetons émis via un système de compensation carbone.
L’accès des femmes aux services numériques  Organisation des groupes de formation féminins (par exemple, recruter une cohorte exclusivement féminine sur trois) pour identifier et répondre aux besoins spécifiques des agricultrices. Adapter le contenu en conséquence (par exemple, en incluant une perspective de genre, notamment dans les contenus de formation sur la santé-sécurité sur la ferme).
Manque d’accessibilité et de capacité à sélectionner les marchés et modalités de vente  Structurer l’approvisionnement des petits producteurs agricoles en intrants, payés via un système de compensation carbone et les revenus d’un outil de gamification les incitant à répondre régulièrement à des questionnaires de suivi d’impact. Favoriser l’accès au marché en soutenant la diversification des cultures tout au long de l’année en dehors du cycle de production de la culture prédominante des fermiers concernés. Conforter les outils d’aide à la décision avec un module qui permettre aux petits exploitants agricoles d’identifier de nouveaux modes de commercialisation, suivre leurs transactions et identifier les meilleures options pour acheter/vendre leurs cultures

 

Conclusion 

A la tête de leurs programmes à impact respectifs, I&P et Ksapa tirent ensemble 5 grands enseignements pour l’intégration d’une solide perspective de genre :

  • Prioriser les questions d’autonomisation des femmes dans le développement de projets de développement agricole
  • Formaliser les contributions directes et indirectes du secteur agricole aux dynamiques de genre
  • Clarifier les rôles et responsabilités pour le développement d’une robuste perspective du genre
  • Attribuer des ressources spécifiques à l’autonomisation des agricultrices
  • Développer des mécanismes de dialogue et de remontée des griefs propres aux agricultrices
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Emploi des jeunes : L’Afrique ne doit pas former plus, mais former mieux

Il suffit de quelques chiffres pour comprendre l’ampleur des enjeux liés à l’employabilité des jeunes sur le continent Africain. Aujourd’hui, les 15-24 ans représentent 20% de la population africaine, mais…

Il suffit de quelques chiffres pour comprendre l’ampleur des enjeux liés à l’employabilité des jeunes sur le continent Africain.

Aujourd’hui, les 15-24 ans représentent 20% de la population africaine, mais plus de 40% des chômeurs[1]. D’ici 2030, selon les estimations de l’UNESCO, environ cent millions de jeunes débarqueront sur le marché du travail en raison de la structure démographique du continent.

En parallèle, nombre d’entreprises et d’employeurs sont en quête de personnel qualifié[2], et de fait employable[3]. On constate dans de nombreux secteurs une inadéquation entre les programmes de formation disponibles et les spécificités du marché du travail, en constante restructuration.

On pourrait donc se demander si le grand défi aujourd’hui n’est pas de former plus, mais de former mieux ? Et ce notamment dans le cadre des parcours d’enseignement et de formation techniques et professionnels, qui ont évidemment un grand rôle à jouer pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes.

Nous allons creuser dans cet article trois pistes d’amélioration, en se basant sur l’expérience concrète d’une PME africaine ivoirienne spécialisée dans la formation professionnelle : l’Institut de Management, de Gestion et d’Hôtellerie (IMGH), fondée par Augustine Bro en 2009. Entre décembre 2020 et juillet 2021, les collaborateurs d’IMGH (managers, middle-managers, formateurs) ont en effet participé à formation destinée au renforcement des capacités, organisées par la GIZ Côte d’Ivoire.

 

Piste n°1 : bien négocier le virage vers la digitalisation

Tournés vers la pratique, l’apprentissage et l’acquisition des techniques de travail, les parcours de formation techniques et professionnels sont les premiers à devoir s’adapter à la mondialisation et aux changements technologiques qui en découlent. La transition vers le numérique, qui devait se faire de manière progressive, a été drastiquement accélérée par la crise de la Covid-19, qui a touché de plein fouet le secteur de la formation, et par la même redéfini les demandes du marché du travail.

Les prérequis pour bien négocier ce virage sont dans un premier temps d’ordre matériel. En Afrique de l’Ouest, la connectivité des foyers n’est pas assurée dans de larges zones rurales ou isolées. À ces enjeux de couverture internet, s’articulent ceux du coût des forfaits pour consulter les outils en ligne nécessaires à l’apprentissage[4]. Enfin, l’acquisition de matériels informatiques pour accéder aux contenus des formations en ligne s’avère être une charge supplémentaire pour les étudiants.

 

Focus IMGH :

Pour pallier ces difficultés matérielle, l’IMGH a mis en ligne des capsules de formation consultables via ordinateur et mobile. Une initiative qui a solutionné à la fois l’impossibilité de tenir des cours en présentiel au plus fort de la crise Covid, et celui de la connectivité des apprenants dans la mesure où la plupart avaient au moins accès à internet via leurs smartphones. Des efforts financiers seront encore à faire pour que la totalité des étudiants aient accès aux cours en ligne.

Depuis la crise Covid, l’IMGH a définitivement adopté une formule mixte, combinant présentiel et distanciel. Ce format offre plusieurs avantages : apprentissage à un rythme personnel, contenu personnalisable, économie de coûts… c’est aussi un modèle qui a fait ses preuves et qui saura s’adapter à de probables crises futures, qu’elles soient d’ordre sanitaire, économique ou politique

 

Au-delà des questions de matériel et de connectivité, le plus grand défi de cette transition vers le digital pourrait être celui de la compétence des formateurs et de la transmission du savoir (savoirs théoriques, mais aussi et surtout le savoir-faire – techniques, gestes professionnels, pratique – et le savoir-être comportements – qualités – valeurs).

Certains de ces éléments, déjà difficiles à transmettre dans le cadre d’un partage en présentiel, le sont encore plus dans le cas des enseignements à distance ou hybrides et nécessitent beaucoup plus d’implication et de pédagogie de la part des formateurs. D’où la nécessité de former au préalable les formateurs et tout autre personne impliquée dans le processus de transmission.

Piste n°2 : mettre à jour les compétences des formateurs

La qualité et la pertinence de toute formation professionnelle découlent directement de la compétence professionnelle des formatrices et formateurs.

Pour le cas particulier des formations professionnelles, les cours proposés sont pour la plupart assurés par des équipes pédagogiques issues du corps du métier. Cette situation répond à la logique de transmission des techniques propres à chaque métier, qu’il serait difficile de partager autrement. Il n’en reste que ces savoirs empiriques, acquis certes grâce à des années d’expérience dans le domaine, ont tendance à se figer dans le temps. Le risque étant qu’une fois transposés sur le marché de l’emploi, les compétences transmises aux étudiants se révèlent être obsolètes. En conséquence, il est capital de renouveler en permanence les compétences des formateurs.

La formation des managers et mid-managers est également un paramètre indispensable. À l’heure de la transformation numérique, le succès d’une nouvelle stratégie de développement repose sur la capacité de tous les collaborateurs à se l’approprier. Ceux-ci contribuent pleinement à la transformation interne de l’entreprise et participent de ce fait au processus de transfert des compétences.

 

Focus IMGH

La formation de la GIZ, suivie par l’équipe d’IMGH, se fonde sur la logique de l’alternance pratique/théorie/pratique qui permet d’actualiser et transporter directement sur le lieu de travail les connaissances acquises grâce à un point de vue et une expérience extérieure à sa propre organisation.

Selon Augustine Bro, fondatrice d’IMGH, cette formation a permis à l’ensemble de son équipe d’être plus au fait des changements qui s’opèrent sur le marché professionnel et d’adapter leurs offres de formation sur le long terme.

 

Piste n°3 : Renforcer les capacités par la méthode de codéveloppement

Enfin, on peut avoir une approche plus collective des nouvelles problématiques liées à la transformation des métiers. Remettre à jour les compétences et savoirs pour s’adapter au mieux à la demande du marché de l’emploi est une nécessité, et le fait d’être au contact d’autres professionnels serait un moyen efficace pour pallier ses propres lacunes et acquérir de nouvelles connaissances.

Le groupe de codéveloppement professionnel est une approche de développement pour des personnes qui croient pouvoir apprendre les unes des autres afin d’améliorer leur pratique. La réflexion effectuée, individuellement et en groupe, est favorisée par un exercice structuré de consultation qui porte sur des problématiques vécues actuellement par les participants[5].

La méthode de codéveloppement permet ainsi de directement attaquer le côté pratique d’un travail, d’une tâche à exécuter, de manière concertée. A l’inverse d’une approche normative qui n’offre finalement qu’un point de vue unique, le codéveloppement, par le biais de la pluralité des contributions, décuple les perspectives de développement. Cette approche invite chacun à considérer une situation d’un angle différent et complémentaire, à pousser la réflexion beaucoup plus loin et à adapter de nouvelles solutions plus productives.

 

Focus IMGH

« L’adoption de la méthode de codéveloppement a amené un nouveau souffle au sein de notre organisation. Une nouvelle dynamique très positive s’est installée et chacun y met volontairement du sien aujourd’hui que cela soit sur des questions de formation, de management ou de gouvernance. Par exemple, ceux qui ont plus de facilité en informatique n’hésitent pas à donner un coup de pouce à leurs collègues en difficulté et ceux qui sont en peine sur d’autres sujets n’hésitent pas non plus à demander des conseils ou de l’aide. Que cela soit sur le plan comptable ou sur l’ambiance de travail, cette méthode ne présente jusqu’ici que des avantages » – Augustine Bro

 

En conclusion

L’inadéquation entre les programmes de formation existant et les besoins d’un marché du travail en constante évolution entravent le développement économique des pays africains. Les opportunités existent et se créent, mais le continent peine encore à fournir une main d’œuvre qualifiée et employable.

Les acteurs de la formation professionnelle, comme IMGH en Côte d’Ivoire, doivent proposer du contenu à jour et pertinent. Nous avons évoqué ici quelques pratiques mises en œuvre par IMGH depuis la crise Covid-19 et la formation de la GIZ (digitaliser son offre de formation, renforcer les compétences des formateurs et des équipes…), mais bien d’autres idées peuvent encore être formulées pour apporter une formation professionnelle pertinente et de qualité à la jeunesse africaine !


[1]  http://www.iiep.unesco.org/fr/en-afrique-la-transformation-de-la-formation-professionnelle-est-en-marche-13763

[2]  Jean-Michel SEVERINO, RFI 20/01/19 https://www.rfi.fr/fr/emission/20190121-afrique-manque-emplois-qualifies-investir-formation

[3] En se référant à la définition donnée par l’Organisation internationale du travail (OIT), l’employabilité est « l’aptitude de chacun à trouver et conserver un emploi, à progresser au travail et à s’adapter au changement tout au long de la vie professionnelle »

[4] https://www.entreprenanteafrique.com/les-ecoles-africaines-au-temps-du-covid-19/#_ftn6

[5] Adrien PAYETTE, Claude CHAMPAGNE, PUQ, 1997 ( https://www.puq.ca/catalogue/livres/groupe-codeveloppement-professionnel-573.html )

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Miser sur l’exception créative africaine

À l’international, l’Afrique intrigue et inspire. De récents exemples le prouvent : la collection été de Gucci en 2019 ; la collection croisière 2019 de Dior, largement inspirée par la…

À l’international, l’Afrique intrigue et inspire. De récents exemples le prouvent : la collection été de Gucci en 2019 ; la collection croisière 2019 de Dior, largement inspirée par la mode africaine et dont certains tissus ont été imprimés en Côte d’Ivoire ; l’ouverture de la fashion week 2021 milanaise par les « Fab Five », cinq créateurs d’origine africaine. Et bien d’autres encore.

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SOAFIARY : l’exemple concret d’une entreprise malgache socialement responsable

Une entreprise peut être beaucoup plus qu’un simple acteur économique et jouer un véritable rôle sociétal, transformant l’environnement dans lequel elle opère. L’entreprise malgache Soafiary le démontre sur plusieurs points,…

Une entreprise peut être beaucoup plus qu’un simple acteur économique et jouer un véritable rôle sociétal, transformant l’environnement dans lequel elle opère. L’entreprise malgache Soafiary le démontre sur plusieurs points, étudiés dans cet article. Depuis sa création en 2006, cette entreprise de l’agrobusiness a intégré son engagement social au cœur de son modèle d’affaires.

 

Créée et dirigée par une femme engagée, Malala Rabenoro, Soafiary est spécialisée dans la collecte, la transformation et la vente de céréales et légumineuses sur le marché local et international. À partir de 2017, elle diversifie son activité en opérant dans la production et la commercialisation de provendes animales ainsi que dans l’exploitation agricole à travers un projet d’agriculture contractuelle en collaboration avec le diocèse de la région.

Son site d’exploitation est situé en zone rurale, à 22km d’Antsirabe dans la région Vakinankaratra, localisée dans les hauts plateaux et connue comme étant le « fermier » de Madagascar. Cette région n’est pas épargnée par la situation de précarité qui sévit dans le pays, avec un taux d’alphabétisation extrêmement faible, un déficit d’infrastructures et un taux de pauvreté élevé. Ces enjeux à la fois sociaux et économiques constituent des défis à relever. Il parait évident pour Soafiary d’y contribuer, en tant qu’acteur soucieux du développement de sa région, et plus largement de Madagascar.

 

Favoriser l’emploi auprès d’une population défavorisée, faiblement scolarisée

La population locale vit majoritairement de l’agriculture de subsistance ou de l’élevage. Faute de moyens, elle peine souvent à produire suffisamment pour assurer l’autosuffisance, et encore moins pour développer son activité. Et faute d’éducation, elle ne peut prétendre à des postes qualifiés dans les entreprises.

Soafiary s’est engagée à contribuer à l’intégration professionnelle de cette population éloignée de l’emploi. Dans ce contexte, elle emploie près de 200 personnes, dont la majorité sont des locaux, engagés pour les travaux de champs, le triage manuel des légumineuses et le conditionnement des produits. Au niveau de l’activité de triage et de conditionnement, le choix a été de les faire manuellement, même si l’automatisation est possible. Ce choix du triage manuel, par opposition au triage automatique opéré par des machines, permet de créer plus d’emplois.

La contribution de Soafiary se concrétise également par l’aide financière sous forme de prêts octroyés aux employés. L’objectif est qu’ils puissent développer une autre activité génératrice de revenu. La majorité se lance dans l’élevage, l’agriculture ou le commerce de produits de première nécessité. C’est ainsi que Soafiary offre à la communauté environnante l’opportunité d’améliorer leur condition économique à travers l’accès à un double emploi.

Soafiary s’engage à contribuer à l’intégration professionnelle d’une population locale éloignée de l’emploi, vivant majoritairement de l’agriculture de subsistance.

Accompagner les employés sur les questions d’alphabétisation et d’hygiène

Soafiary compte parmi ses employés 21% d’illettrés, 46% ayant atteint le niveau primaire et 25% ayant accompli l’éducation secondaire de premier cycle. Engager des personnes faiblement scolarisées issues du monde rural est un réel engagement de l’entreprise, qui a mis en place un accompagnement poussé afin de leur permettre l’assimilation des gestes clés utiles à la production, l’apprentissage des mesures d’hygiène et des compétences fondamentales telles que la lecture et l’écriture.

Sur les questions d’hygiène, Soafiary réalise de manière régulière des sensibilisations à l’hygiène corporelle, à l’usage correct du bloc sanitaire et à l’hygiène de l’eau à ses employés, qui ne sont familiers à aucune de ces approches.

En ce qui concerne l’alphabétisation, les actions entreprises se centralisent sur l’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour que les employés puissent être capables de vérifier leur fiche de paie, à travers l’identification et la validation des informations leur concernant notamment leur nom et prénom, la vérification du montant inscrit, pour ensuite y apposer leur signature si la fiche leur est satisfaisante. Ceci a permis d’instaurer un climat de confiance et d’échange au sein de la société.

Ces actions paraissent basiques mais leur mise en place n’est pas facile et prend du temps. C’est grâce au profil atypique de la directrice de production, Agnès Randrianampizafy, enseignante de formation, que l’accompagnement est rendu possible avec le soutien et l’engagement de toute l’équipe. « Il faut être pédagogue, patient et savoir inculquer une discipline » souligne-t-elle.

 

Soutenir, accompagner et former les petits producteurs à travers le projet Soadio (SOAfiary – DIOcèse)

Le secteur de l’agro business fait face à plusieurs grands enjeux et doit résoudre l’équation entre l’inclusion des petits producteurs, le respect de l’environnement, la qualité des produits et la compétitivité des prix, le tout dans un environnement où la concurrence internationale est forte.

Soafiary tente de répondre à ces enjeux à travers son projet Soadio, un modèle d’agriculture contractuelle responsable qui consiste à former les petits producteurs et à mettre à leur disposition les matériels agricoles ainsi que les intrants nécessaires à l’exploitation des 4 100 Ha de terrain appartenant au Diocèse de la région Vakinankaratra. À partir de 2017, date de lancement du projet, 380 Ha ont été exploités dont la totalité de la production est achetée par Soafiary.

Le projet est un vrai levier socio-économique pour la région. Il vise à l’amélioration de la condition de vie des petits producteurs à Morarano, une commune rurale située à 200 km du site d’exploitation de Soafiary, où sont localisés les terrains du Diocèse. Il permet également l’inclusion des petits producteurs dans la chaîne de valeur de Soafiary, qui assurent désormais l’approvisionnement. La stratégie consiste pour Soafiary à apporter les marchés et l’accompagnement nécessaire pour que les petits producteurs puissent fournir les matières premières. Plus largement, Soafiary joue le rôle de catalyseur pour le développement de l’agrobusiness dans la région avec l’intégration des petits producteurs ruraux dans la chaine de valeur de la production des céréales et grains secs, en plus de coordonner la synergie des actions entre les différents acteurs de la filière à savoir : Diocèse, producteurs, partenaires techniques, financiers et institutionnels et clients.

Soafiary joue le rôle de catalyseur pour le développement de l’agrobusiness dans la région Vakinankaratra, permettant l’intégration des petits producteurs ruraux dans la chaine de valeur de la production des céréales et grains secs

Ce partenariat inclusif entre Soafiary et le Diocèse est un pas en avant vers une cohésion sociale et humanitaire, qui n’est qu’un préalable pour le lancement de différents projets : mise en place d’un système d’irrigation, renforcement des terrains pour lutter contre l’érosion, renforcement du centre de santé de base par l’octroi de matériels médicaux, amélioration de l’unique école du village par l’extension des salles de classe, appui des centres de formations agricoles, pour n’en citer que quelques-uns.

 

Soafiary démontre qu’intégrer les engagements sociaux au cœur des activités peut être bénéfique pour l’entreprise. Cette démarche lui a permis de gagner plus d’engagement de la part de ses employés en contrepartie des appuis octroyés, mais aussi et surtout, de construire un modèle d’agriculture contractuelle responsable sécurisant son volume d’approvisionnement tout en répondant aux enjeux de qualité et de traçabilité des produits.

 

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Covid-19 : quels impacts sur le secteur de la petite enfance ?

Face aux fermetures d’établissements scolaires qui ont eu lieu dans au moins 188 pays autour du monde suite à la crise de Covid-19, beaucoup d’institutions éducatives ont dû mettre en…

Face aux fermetures d’établissements scolaires qui ont eu lieu dans au moins 188 pays autour du monde suite à la crise de Covid-19, beaucoup d’institutions éducatives ont dû mettre en place un système d’apprentissage à distance. Cette réorganisation temporaire de l’activité aura assurément un impact fort et durable sur les structures éducatives.

Si cet apprentissage à distance est parfois complexe, notamment à cause des problématiques de connexion ou de disponibilité des outils informatiques, il l’est encore plus pour le secteur de la petite enfance, compte tenu du risque de surexposition des tout-petits aux outils numériques et l’absence d’autonomie de ces derniers dans leur apprentissage, ce que témoignent les trois acteurs dédiés à ce secteur rencontrés pour cet article.

 

Un apprentissage à réinventer

La crise sanitaire actuelle a forcé les institutions éducatives dans leur ensemble à réinventer et repenser leurs activités. La Coccinelle, un réseau de crèches et d’écoles maternelles en Côte d’Ivoire a ainsi mis en ligne des exercices, des jeux éducatifs, des comptines et quelques activités de graphisme, pré-lecture et de mathématiques pour que les enfants ne perdent pas leurs acquis. Chez Kër ImagiNation, un centre d’apprentissage et de culture pour les enfants au Sénégal, des sessions en ligne par Zoom ont été effectuées en petits groupes pour permettre une meilleure participation des enfants. Au fur et à mesure, les contenus et la façon d’interagir à distance avec les enfants se sont affinés, avec par exemple l’utilisation de marionnettes ou la proposition d’expériences éducatives simples, comme une expérience sur l’eau, que les enfants pouvaient réaliser chez eux avec leurs parents.

L’apprentissage en ligne, bien qu’il soit possible, et parfois même favorable, pour les matières théoriques, ne se prête pas facilement à l’apprentissage pratique. Ainsi, chez La Coccinelle, les parents devaient imprimer les exercices pour permettre aux enfants de travailler sur papier. Car beaucoup de domaines, comme par exemple le graphisme, ne peuvent être appris en ligne. Chez, l’Institut Académique des Bébés au Sénégal, une école de formation diplômante dédiée à la formation professionnelle des métiers de l’Enfance, les matières pratiques représentent environ 45% du cursus des apprenant.e.s. Pour ces matières, l’apprentissage en ligne n’était pas envisageable et des ateliers pratiques ont été réalisés dans les locaux, en petits groupes. Cela a nécessité néanmoins un investissement conséquent pour la promotrice, car c’est toute l’organisation de l’école qu’il a fallu repenser. L’espace a dû être réaménagé, pour respecter le mètre de distanciation sociale entre les apprenant.e.s. Un achat conséquent de masques et de gel hydro alcoolique a dû être réalisé pour équiper les apprenant.e.s et formateurs.rices. Et enfin, entre chaque groupe, une désinfection des locaux s’imposait.

L’apprentissage en ligne, possible et parfois favorable pour les matières théoriques, ne se prête pas facilement à l’apprentissage pratique

 

 

Un apprentissage empli de difficultés

La crise a révélé d’énormes disparités dans le niveau de préparation des pays aux situations d’urgence, l’accès des enfants à Internet et la disponibilité du matériel pédagogique. Ces difficultés rendent difficile le maintien en éveil et l’apprentissage des enfants éloignés de ces outils.  De plus, pour réaliser cet apprentissage à distance, il a fallu souvent former, à la fois les parents et les formateurs.rices, aux outils numériques.

Enfin, l’école à la maison nécessite pour les tout-petits la présence d’un parent ou d’un adulte, à même d’accompagner l’enfant dans son apprentissage. Or les occupations professionnelles de ces derniers n’étaient pas forcément compatibles avec les besoins des enfants. La fermeture des établissements scolaires a laissé les parents en désarroi sur la façon d’accompagner l’apprentissage des enfants à la maison. Consciente de ces enjeux, Karima Grant, fondatrice de Kër ImagiNation, souhaite désormais développer un projet dédié spécifiquement aux parents, afin de les accompagner, à travers une plateforme, dans la parentalité et la pédagogie.

La fermeture des établissements scolaires a laissé les parents en désarroi sur la façon d’accompagner l’apprentissage des enfants à la maison.

 

 

Une même inquiétude : le futur du secteur de la petite enfance et, en conséquence, le futur de ces enfants

Les réalités du secteur de la petite enfance sont particulièrement préoccupantes : en effet, le recouvrement des frais de scolarité est encore plus complexe en période de fermeture des établissements scolaires, auquel s’ajoutent les charges de personnel et de fonctionnement de l’école. Beaucoup d’acteurs de la petite enfance en Afrique Subsaharienne sont aujourd’hui dans une situation délicate, avec beaucoup d’incertitudes pour la rentrée scolaire.

Ces derniers se sentent oubliés par les autorités publiques, alors même que le secteur de la petite enfance est primordial pour le développement et la construction de l’enfant. Au Bangladesh, une étude mise en place par le Strategic Impact Evaluation Fund (SIEF) de la Banque Mondiale a révélé que fournir aux jeunes enfants une année supplémentaire d’éducation préscolaire est un moyen efficace d’améliorer la préparation à l’école pour les filles et les garçons (et surtout les filles). Les chercheurs ont mesuré l’impact d’une année supplémentaire de préscolaire des enfants à l’âge de 4 ans, par rapport à l’année standard d’un an seulement à partir de 5 ans. Au bout de deux ans, les enfants à qui l’on a proposé une année supplémentaire de préscolaire ont obtenu des résultats nettement plus élevés en matière de lecture, d’écriture, de calcul et de développement socio-affectif que les enfants qui n’ont accès à la préscolarisation qu’à partir de l’âge de 5 ans.

Selon Sara Adico, directrice de La Coccinelle, « L’éveil, la simulation et l’épanouissement des enfants ont été relégués au dernier plan. Or si la petite enfance est bien encadrée, elle favorise un bon développement psychique de l’enfant, ce qui est porteur pour toute la nation ».  Les enfants auraient déjà commencé à désapprendre, tant au niveau des compétences (graphisme, dictée…), qu’au niveau psychique (interactions sociales, motricité…), une situation plus aggravée pour les enfants souffrant de problèmes psychosociaux. Selon ces acteurs, si la situation venait à s’éterniser, cela devrait affecter le primaire, le secondaire et enfin le supérieur dans les années à venir, et ainsi représenter un réel problème de capital humain et causer de sérieuses répercussions économiques.

Si la situation venait à s’éterniser, cela devrait affecter le primaire, le secondaire et enfin le supérieur , et ainsi représenter un réel problème de capital humain dans les années à venir

 

Que ce soit pour Sara Adico de La Coccinelle, Karima Grant de Kër ImagiNation ou Fa Diallo d’IAB, la crise actuelle peut être une opportunité de réinventer et de repenser le secteur de la petite enfance. C’est un moyen, pour la communauté éducative de ce secteur, une fois les faiblesses de l’outil numérique comme solution à l’apprentissage à distance pour la petite enfance reconnues, de chercher des solutions innovantes destinées à améliorer la valeur ajoutée à la prise en charge de l’enfant.  Mais pour cela, une réflexion doit être menée avec l’ensemble des parties prenantes (les familles, les institutions publiques, les grands employeurs…) pour trouver et créer des dispositifs favorables à la construction psychologique des enfants. Concernant la petite enfance, il ne convient pas de limiter ses efforts dans le domaine de la santé ou de la nutrition, car l’inexistence de structure de prise en charge de qualité de la petite enfance peut être spécialement dommageable pour le développement psychique de l’enfant et ainsi, à plus long terme, avoir de réelles implications économiques et de capital humain.

 

Pour aller plus loin

Découvrir dans cette série l’article “Les écoles africaines au temps du Covid-19”

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Éducation des filles, émancipation des femmes

Aujourd’hui, de nombreuses jeunes filles rencontrent des barrières importantes concernant l’accès à l’éducation – primaire, secondaire et supérieure –, l’obtention d’un emploi décent et rémunérateur, l’accès aux financements… Leur éducation…

Aujourd’hui, de nombreuses jeunes filles rencontrent des barrières importantes concernant l’accès à l’éducation – primaire, secondaire et supérieure –, l’obtention d’un emploi décent et rémunérateur, l’accès aux financements… Leur éducation est souvent jugée non prioritaire, quand elle est en réalité un premier pas vers leur émancipation et leur autonomisation.

 

Une formation inclusive, pertinente et de qualité…

L’Afrique subsaharienne compte 30 millions d’enfants exclus du système scolaire. Les filles, les populations rurales et les communautés marginalisées sont particulièrement touchées. Un des obstacles les plus persistants à la scolarisation des filles est la faible valeur accordée par la société à leur éducation. Lorsque la scolarité n’est plus obligatoire, les familles n’inscrivent pas leur fille, non seulement pour des raisons financières, mais aussi en raison de normes sociales (maintien des filles à la maison, mariage et maternité précoces, infrastructures scolaires inadéquates, discriminations, etc.)

L’éducation primaire a bénéficié d’un soutien important des gouvernements et de l’aide au développement. Des progrès considérables ont alors été réalisés. En Afrique Subsaharienne, 34 % des pays avaient atteint la parité en ce qui concerne l’enseignement primaire en 2017. En revanche, cette performance tombe à 21% pour le premier cycle du secondaire, 5% pour le deuxième cycle du secondaire et même 0% pour l’enseignement supérieur[1]. Faute de moyens financiers et humains suffisants, l’éducation supérieure a fait l’objet de moins d’attention, alors même que les besoins sont immenses et les inégalités de genre criantes.

Pour devenir de véritables actrices du développement de leur région et de leur pays, les jeunes filles et jeunes femmes ont besoin d’un accès continu à une éducation pertinente et de qualité. Des programmes de « seconde chance » à destination des femmes et des jeunes femmes vulnérables, qui n’ont pu bénéficier d’une éducation suffisante pour leur permettre émancipation et autonomisation peuvent être envisagés. Dans ce sens, l’ONU Femmes développe son programme « Second Chance Education and Vocational Learning (SCE) » visant à soutenir les femmes et jeunes femmes marginalisées, n’ayant pu bénéficier d’une éducation et risquant d’être laissées pour compte. Ce projet vise à développer des parcours d’apprentissage, d’entreprenariat et d’emploi adaptés au contexte, abordables et évolutifs, afin de permettre l’émancipation des femmes et jeunes femmes les plus défavorisées du monde.

Il s’agit également de faire évoluer les mentalités : développer des contenus éducatifs qui soient neutres au niveau du genre et mettre en place des actions de sensibilisation destinées à changer la perception que peuvent avoir, à la fois les hommes et les femmes, sur les perspectives de carrière ouvertes aux jeunes femmes.

 

… permet l’accès à des opportunités économiques…

Des différences sensibles entre hommes et femmes sont apparues sur le marché du travail, selon le secteur d’activité, la profession et le type d’emploi (ségrégation verticale et horizontale relative au genre). Les femmes travaillent fréquemment dans des secteurs où les formations susceptibles de permettre une évolution de carrière ou un changement de métier sont plus rares. L’Afrique est la deuxième région du monde la moins égalitaire en termes de participation des femmes à l’économie formelle. Près de 90% des femmes employées sur le continent travaillent dans l’économie informelle, contre 83 % des hommes[2].

La participation des femmes au monde du travail et leur ascension professionnelle se heurtent en outre à des obstacles considérables qui sont le fruit de cultures et de pratiques sectorielles et organisationnelles dominées par des valeurs, des convictions et des modes de comportement (encouragés ou confortés par les normes sociales et les institutions) qui ont un effet de repoussoir ou de plafond de verre.

Les femmes sont ainsi moins susceptibles que les hommes d’étudier dans les domaines de la science, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques. En 2013, la part des femmes diplômées de l’enseignement supérieur en Sciences ainsi qu’en Ingénierie était respectivement de 19% et 21% au Burkina Faso et de 27% et 18% au Ghana[3]. Le manque d’informations sur les possibilités offertes dans ces secteurs dominés par les hommes, les facteurs psychosociaux, l’absence de rôles modèles, les réseaux et les normes sexistes biaisées sont quelques-uns des facteurs qui expliquent ces dynamiques.

Outre les compétences traditionnelles telles que la lecture, l’écriture et le calcul, les compétences numériques sont depuis longtemps devenues l’un des principaux domaines d’expertise pour le 21e siècle. 55% des femmes chefs d’entreprise affirment qu’améliorer leur expertise technique est une priorité. Or, près d’un milliard de filles dans le monde (soit 65% de toutes les filles et jeunes femmes de moins de 24 ans) ne possèdent pas ces compétences, qui sont essentielles pour participer au monde du travail à l’avenir. Certains acteurs se sont ainsi déjà positionnés sur cet enjeu. C’est le cas par exemple du Ghana Code Club[4], qui, avec son projet “Code on Wheels”, va organiser un atelier mobile de codage pour les filles et les femmes de 12 à 24 ans dans différentes régions du pays. Les ateliers permettent aux participantes de se familiariser de manière ludique et pratique avec la pensée et les compétences techniques sur ordinateur.

 

… favorables à l’émancipation économique et sociale des femmes.

Les opportunités économiques jouent pourtant un rôle central dans les rapports sociaux. Avoir accès à un emploi décent et rémunérateur, permet de s’affirmer comme membre de la société économique, ce qui constitue un premier pas vers l’autonomisation et l’émancipation.

Donner à davantage de femmes la possibilité d’accéder à des opportunités économiques, d’entreprendre, de consommer librement et de faire partie intégrante de la vie économique réduit non seulement considérablement les inégalités de genre, mais transforme également la société et l’économie dans leur ensemble. En effet, l’inégalité entre les genres freine le développement économique et social. Elle coûterait en moyenne 95 milliards de dollars US par an à l’Afrique subsaharienne, atteignant un pic de 105 milliards de dollars US en 2014 – soit 6 % du PIB de la région[5] – ce qui compromet les efforts du continent pour un développement humain et une croissance économique inclusifs.

 

L’accès à une éducation de qualité, en particulier pour les filles, est ainsi essentiel pour lutter contre le cycle de la pauvreté et pour garantir à une société plus inclusive, l’égalité des chances pour tous.

 


Sources

[1] Rapport mondial de suivi sur l’éducation 2019: Migration, déplacement et éducation: bâtir des ponts, pas des murs, UNESCO, 2019

[2] The power of parity: Advancing women’s equality in Africa, McKinsey Global Institute, November 2019

[3] Is the gender gap narrowing in science and engineering, Unesco, 2015

[4] Pour en savoir plus sur le Ghana Code Club

[5] Rapport sur le développement humain en Afrique 2016 : Accélérer les progrès en faveur de l’égalité des genres et de l’autonomisation des femmes en Afrique, PNUD, 2016

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Le numérique pour relever le taux de réussite scolaire en Afrique

Octobre 2000 – Octobre 2018, déjà 18 ans que j’ai quitté le lycée dans lequel j’ai passé tout mon cycle secondaire de la 6ème à la Terminale: le lycée municipal…

Octobre 2000 – Octobre 2018, déjà 18 ans que j’ai quitté le lycée dans lequel j’ai passé tout mon cycle secondaire de la 6ème à la Terminale: le lycée municipal de la plus grande commune d’Abidjan, grande par sa superficie, son nombre d’habitants au m2 mais aussi et surtout grande par le nombre d’élèves comptés par classe, à cette époque: 80 en moyenne. Je le retrouvais en 2018 scindé en deux lycées pour une meilleure gestion du nombre pléthorique d’élèves dans les mêmes bâtiments vétustes datant de plus 30 ans.

Enthousiasme et nostalgie traduisent parfaitement les sentiments qui m’ont animée pour la présentation du projet qui m’y avait conduit, un projet de coeur d’une haute ambition : relever le taux de réussite aux examens de cet établissement qui oscille autour de 30%, finalement pas si loin de celui du taux national au Baccalauréat (40% en moyenne des 5 dernières années).

Je me nomme Christelle HIEN-KOUAME, ingénieure en marketing et communication, entrepreneuse depuis maintenant 9 ans dans le domaine de communication et du marketing et foncièrement passionnée par l’éducation offerte aux élèves dans mon pays et mon continent.

Contribuer à relever  le taux de réussite scolaire national, n’était-ce pas trop ambitieux comme objectif ?

Le saut dans le domaine éducatif est passionnant et engagé car il nous concerne tous depuis le niveau d’instruction du personnel de la maisonnée, jusqu’au rendu professionnel des collaborateurs en entreprise. Que l’on soit ou non un acteur de l’éducation, nous sommes tous impactés, mieux vaut alors y contribuer à sa manière et selon ses moyens.

Le projet prenezlesfeuilles.com

Le projet au départ était d’offrir aux élèves un recueil numérique de devoirs et d’examens tiré des meilleurs établissements de Côte d’Ivoire afin :

  • de préparer les élèves à exceller dans leurs devoirs et examens car on ne réinvente pas la roue, on l’adapte, la customise: les devoirs et examens de notre système éducatif sont définis par le programme scolaire. Chaque année, d’autres élèves s’y soumettent, les plus malins s’y préparent et les plus intelligents comprennent ce qu’il leur faut comme base pour affronter tous types de devoirs ou examens.
  • leur redonner confiance en eux quant à leur niveau car en réalité un enfant de 3ème d’un lycée coté de la capitale n’a pas le même niveau qu’un élève de même cycle d’un autre établissement d’une ville de l’intérieur du pays !

Mes deux objectifs primaires définis, je m’orientai vers le numérique pour offrir une solution accessible, fiable et innovante à tous ces élèves. Me voilà lancée sans le savoir dans la EDTECH avec les fonds de mon agence de Communication qui voyait s’empiler des devoirs de toutes les disciplines provenant des établissements qui n’avaient pas moins de 70% de taux de réussite aux examens.

Le bébé naît, est spolié dans un pays voisin, est donc rebaptisé un an plus tard sous www.prenezlesfeuilles.com, est officiellement présenté aux autorités (ministère de l’éducation nationale), est apprécié et autorisé à être présenté aux élèves dans tous les établissements du pays. Les affres et tumultes de sa conception lui ont donné plus de coffre, plus de résilience, plus d’objectifs à atteindre. Se limiter à mettre des devoirs et examens à la disposition d’élèves devenait restrictif. Il fallait proposer plus d’alternatives pour les inciter à faire réellement leurs devoirs, les challenger, les motiver à se surpasser quelque soient leurs séries ou disciplines choisies, faire mieux que nous les années précédentes.

Évolutions de la plateforme

Après une analyse profonde des facteurs de réussite, un facteur clé paraissait irréfutable (autre que l’environnement et la motivation) : les outils d’apprentissage.

Nous avons alors intégré à la plateforme trois ingrédients importants: la motivation par la récompense en leur offrant des cadeaux pour des quizz ou exercices effectués correctement dans un délai imparti, l’aide à l’orientation en parlant de métiers avec des parcours différents et enrichissant pour semer des graines de rêve conducteur et enfin des petites capsules de culture générale diffusées sur leur téléphone mobile par le canal WhatsApp.

En Août 2019 www.prenezlesfeuilles a été racheté par ENEZA EDUCATION, entreprise EDTECH, initiatrice d’un autre service éducatif innovant via le mobile qui offre des tutoriels de cours et des quiz via le canal SMS de n’importe quel téléphone mobile (EDU par sms au 98051 en CIV). Aujourd’hui alors, l’élève ivoirien a à sa portée les cours de tout son programme scolaire expliqué en mini tutoriels et des quizz lui permettant de vérifier ses connaissances. Le site prenezlesfeuilles l’aide à préparer les prochaines évaluations à partir de devoirs déjà réalisés dans les meilleurs établissements du territoire.

Le prochain challenge est de mieux faire connaitre cette solution auprès de tous les élèves et parents d’élèves sur toute l’étendue du territoire et de prouver son réel impact dans les résultats scolaires des abonnés.

Les challenges… j’adore les relever! Comme celui d’il y a 18 ans lorsque j’étais la seule fille d’une classe de terminale scientifique dans un lycée de la commune de Yopougon (commune populaire d’Abidjan capitale de la Cote d’ivoire) qui ne devait pas pâlir face au taux de réussite des « garçons » au Baccalauréat. Ou comme celui d’il y a 9 ans lorsque je démissionnais pour m’installer à mon propre compte comme jeune entrepreneuse dans le domaine de la communication et qui devait assumer son choix et tout ce que cela impliquait…. relever les challenges non par euphorie ou plaisir mais pour redonner une part de ce que nous avons reçu gracieusement de la famille, de l’Etat et de la société  … redonner pour être plus riche !

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